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March 13, 2010

March 13, 2010 - L'Orient le jour - Encore une fois, la Syrie souffle le chaud et le froid en raison des révélations du TSL

Par Émile Khoury

Damas attaque de nouveau, via ses médias officiels et ses porte-voix libanais. Hariri doit donc s'y rendre, alors que les effets de sa première visite n'ont même pas eu le temps de s'ébaucher, pour se renseigner. Tenter de comprendre les raisons du changement d'attitude des Syriens, si chaleureux quand ils l'avaient accueilli, et qui lui font maintenant grise mine. Les motivations avancées jusqu'à présent par les organes officiels syriens n'ont rien de convaincant. Ils soutiennent en effet que le Premier ministre libanais n'a pas tenu les engagements pris à Damas. En précisant que Hariri n'a toujours pas désigné, comme il l'avait promis à Assad, une équipe de négociateurs libanais chargés de préparer avec les responsables syriens une liste de sujets, de problèmes, de dossiers à discuter. Une lacune que l'on peut qualifier de broutille. En revanche, on saisit mieux la saute d'humeur de Damas quand on lit dans ses journaux que Hariri n'a rien fait, non plus, pour agencer un programme d'orientation interne visant à mettre un terme aux critiques portées contre la Syrie par des cadres ou des médias du Courant du futur. Il aurait également promis une telle mise au pas à Bachar el-Assad. Allant plus loin, les Syriens reprochent à Hariri d'avoir tenu, en Italie et au Koweït, des propos qui, selon eux, ne vont pas dans le bon sens. Sans doute parce que ces dires défendent, notamment, le principe d'un Liban souverain et indépendant.
Cela étant, comme Hariri ne cesse de le répéter, le Liban officiel ne veut alimenter aucune discorde, mais au contraire assainir et resserrer valablement les liens avec la Syrie. C'est pourquoi il n'hésite pas à démarcher directement Damas, au lieu de s'en éloigner, sous le feu des piques reçues. Il s'y trouve encouragé par l'Arabie saoudite et la Turquie, dont les diplomaties respectives mettent l'accent sur la nécessité de promouvoir, ou plutôt de rétablir, la confiance entre le Liban et la Syrie. Pour mieux parer les menaces israéliennes, tout comme pour faire face à l'ensemble des développements mettant la région en danger, pour ce qui est du nucléaire iranien, de la Palestine ou de l'Irak.
Après sa prochaine entrevue avec le président Assad, le président Hariri devrait sans doute indiquer que le malentendu est dissipé. Tandis que Damas annoncerait une prochaine visite de son propre Premier ministre, Naji Otri, à Beyrouth, suivie de contacts intensifiés entre les ministres des deux pays, dans l'une ou l'autre capitale.
Selon des observateurs qualifiés, les raisons véritables de l'actuel mécontentement syrien tiennent au fait qu'en raison du récent rapport de son président, comme des démarches à Beyrouth de ses cadres ou des explications de son parquet aux médias, le tribunal international se trouve de nouveau en vedette. Or cette instance constitue la bête noire numéro un des Syriens. D'autant que le rapport du président Antonio Cassese peut avoir de quoi les alarmer quand il souligne les progrès sensibles accomplis dans l'enquête visant à identifier les parties coupables de l'assassinat du président Rafic Hariri et de ses compagnons, ainsi que des multiples attentats, ou assassinats, perpétrés par la suite au Liban. Le document confirme également que le crime du 14 février avait été exécuté par une cellule d'action réduite opérant dans le cadre, et sous les directives, d'un réseau nettement plus étendu. Il est également indiqué que l'on est bien près d'identifier le terroriste qui s'est fait sauter, son origine géographique étant maintenant établie et les traits de son visage partiellement retrouvés. D'autres points du rapport promettent, avec l'accélération des investigations, la publication de l'acte d'accusation dans des délais relativement rapprochés.
De plus, la logistique judiciaire est maintenant prête. Le prétoire pourra ouvrir ses portes en avril prochain. Le budget, porté de 51,4 millions de dollars l'an dernier à 55,4 millions cette année, est assuré. Le Liban, qui y participe à hauteur de 49 %, s'est acquitté de son dû.
Pour les observateurs cités, le tribunal n'aurait jamais rendu publiques des indications aussi importantes que l'existence d'un réseau élargi ou le quasi-portrait robot de l'exécutant-suicide, s'il n'était absolument sûr de son fait. Au point de promettre l'acte d'accusation pour assez bientôt. Ce qui ne saurait se faire, concluent-ils, sans que les commanditaires n'aient été d'abord déterminés. Et c'est tout dire.

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