Que se passe-t-il quand une femme tente de porter plainte pour violence domestique en l’absence d’une loi spécifique, sachant que 97 % des victimes de ce genre de violence sont des femmes ? Il lui est souvent très difficile de prouver l’agression, et le cas se termine presque toujours par un engagement oral de l’agresseur, une sorte de réconciliation ou un retrait de la plainte, sans véritable conséquence pour le coupable.
C’est ce qui ressort d’une étude présentée hier par l’association Kafa, dans une conférence conjointe avec l’ordre des avocats et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), qui s’est déroulée à la Maison de l’avocat. Marie-Rose Zalzal, qui a dirigé l’étude, a expliqué que celle-ci s’est basée sur des cas recensés de plaintes déposées par des victimes en 2009, et qu’au final 115 cas ont été retenus. Fait intéressant : ces plaintes n’ont pas toutes été déposées contre des hommes, parfois contre des femmes de la famille comme la mère, la sœur, la belle-sœur... Toutefois, dans 44 cas, l’agresseur désigné par la victime était le mari. Ces plaintes portaient sur des cas de coups et blessures, de tentatives de meurtre, de violence verbale, d’incitation à la prostitution, de recel de biens, de renvoi de la maison, d’enlèvement des enfants.
Mme Zalzal évoque les réclamations des plaignantes : 12 seulement ont demandé l’arrestation de l’agresseur, contre 87 qui voulaient simplement une protection, 7 le retour des enfants à la maison, etc. Pour ce qui est des agresseurs, les conséquences n’ont pas été dramatiques pour eux : trois ont été arrêtés entre 9 et 18 heures. Beaucoup sont relâchés après s’être engagés à ne plus recommencer, sans qu’il y ait un quelconque moyen de vérifier la suite des événements. Dans nombre de cas, sous la pression sociale et familiale, la femme s’empresse de retirer sa plainte dès que le mari est arrêté.
La principale difficulté reste, selon Marie-Rose Zalzal, de prouver l’agression, la victime n’ayant souvent que le rapport du médecin légiste, parfois imprécis, comme pièce à conviction. En effet, étant souvent le maillon faible dans l’environnement familial, la femme éprouve le plus grand mal à avoir l’appui de témoins, selon elle.
D’un point de vue légal, la loi n’est actuellement pas favorable aux victimes de violence domestique. Mme Zalzal estime que le code pénal présente de nombreux aspects discriminatoires envers la femme, comme celui de consacrer les crimes d’honneur ou de ne reconnaître aucune spécificité à la violence domestique, qui est pourtant un crime particulier. Or c’est cette spécificité qui, selon elle, justifie l’adoption du projet de loi présenté par Kafa, adopté en Conseil des ministres mais examiné actuellement au Parlement. Elle ajoute que d’ici à l’adoption finale du projet de loi, il existe des mesures permettant un meilleur traitement des cas de victimes de violence domestique.
Quelle égalité ?
Le projet de loi de Kafa sur la lutte contre la violence domestique a été également au centre de l’allocution prononcée par la présidente de l’association, Zoya Rouhana. Celle-ci a déploré le fait que les opposants à ce projet de loi « invoquent l’aspect discriminatoire de cette loi envers l’homme, étant donné que les victimes de violence domestique sont généralement les femmes, allant même jusqu’à considérer cette loi comme anticonstitutionnelle ». Elle se demande « pourquoi ces mêmes personnes ne se sont jamais insurgées contre la discrimination qui frappe les femmes dans le code pénal, pourquoi n’ont-elles jamais dénoncé les crimes perpétrés contre les femmes au nom de l’honneur ? »
Autant Rouhana que Shombi Sharp, vice-directeur du PNUD au Liban, ont relevé l’absence de femmes dans le nouveau gouvernement et la nécessité de faire avancer les causes féminines, notamment celle de la lutte contre la violence (le PNUD était partenaire dans la préparation du texte de loi). Enfin, Sonia Attié, qui représentait la bâtonnière Amal Haddad, a traité la violence domestique de « fléau social » et appelé à la lutte contre la violence qui vise les femmes à trois niveaux : physique, sexuel et moral.
S. B.
C’est ce qui ressort d’une étude présentée hier par l’association Kafa, dans une conférence conjointe avec l’ordre des avocats et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), qui s’est déroulée à la Maison de l’avocat. Marie-Rose Zalzal, qui a dirigé l’étude, a expliqué que celle-ci s’est basée sur des cas recensés de plaintes déposées par des victimes en 2009, et qu’au final 115 cas ont été retenus. Fait intéressant : ces plaintes n’ont pas toutes été déposées contre des hommes, parfois contre des femmes de la famille comme la mère, la sœur, la belle-sœur... Toutefois, dans 44 cas, l’agresseur désigné par la victime était le mari. Ces plaintes portaient sur des cas de coups et blessures, de tentatives de meurtre, de violence verbale, d’incitation à la prostitution, de recel de biens, de renvoi de la maison, d’enlèvement des enfants.
Mme Zalzal évoque les réclamations des plaignantes : 12 seulement ont demandé l’arrestation de l’agresseur, contre 87 qui voulaient simplement une protection, 7 le retour des enfants à la maison, etc. Pour ce qui est des agresseurs, les conséquences n’ont pas été dramatiques pour eux : trois ont été arrêtés entre 9 et 18 heures. Beaucoup sont relâchés après s’être engagés à ne plus recommencer, sans qu’il y ait un quelconque moyen de vérifier la suite des événements. Dans nombre de cas, sous la pression sociale et familiale, la femme s’empresse de retirer sa plainte dès que le mari est arrêté.
La principale difficulté reste, selon Marie-Rose Zalzal, de prouver l’agression, la victime n’ayant souvent que le rapport du médecin légiste, parfois imprécis, comme pièce à conviction. En effet, étant souvent le maillon faible dans l’environnement familial, la femme éprouve le plus grand mal à avoir l’appui de témoins, selon elle.
D’un point de vue légal, la loi n’est actuellement pas favorable aux victimes de violence domestique. Mme Zalzal estime que le code pénal présente de nombreux aspects discriminatoires envers la femme, comme celui de consacrer les crimes d’honneur ou de ne reconnaître aucune spécificité à la violence domestique, qui est pourtant un crime particulier. Or c’est cette spécificité qui, selon elle, justifie l’adoption du projet de loi présenté par Kafa, adopté en Conseil des ministres mais examiné actuellement au Parlement. Elle ajoute que d’ici à l’adoption finale du projet de loi, il existe des mesures permettant un meilleur traitement des cas de victimes de violence domestique.
Quelle égalité ?
Le projet de loi de Kafa sur la lutte contre la violence domestique a été également au centre de l’allocution prononcée par la présidente de l’association, Zoya Rouhana. Celle-ci a déploré le fait que les opposants à ce projet de loi « invoquent l’aspect discriminatoire de cette loi envers l’homme, étant donné que les victimes de violence domestique sont généralement les femmes, allant même jusqu’à considérer cette loi comme anticonstitutionnelle ». Elle se demande « pourquoi ces mêmes personnes ne se sont jamais insurgées contre la discrimination qui frappe les femmes dans le code pénal, pourquoi n’ont-elles jamais dénoncé les crimes perpétrés contre les femmes au nom de l’honneur ? »
Autant Rouhana que Shombi Sharp, vice-directeur du PNUD au Liban, ont relevé l’absence de femmes dans le nouveau gouvernement et la nécessité de faire avancer les causes féminines, notamment celle de la lutte contre la violence (le PNUD était partenaire dans la préparation du texte de loi). Enfin, Sonia Attié, qui représentait la bâtonnière Amal Haddad, a traité la violence domestique de « fléau social » et appelé à la lutte contre la violence qui vise les femmes à trois niveaux : physique, sexuel et moral.
S. B.

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