En dépit du flou qui entoure l’avenir de la loi électorale,
l’Association pour la démocratie des élections (LADE) se prépare à lancer sa
campagne en direction des politiques pour les rappeler à l’ordre et faire
pression en vue de faire passer son projet axé sur la proportionnelle.
Un an nous sépare de l’échéance des élections
législatives. La bataille électorale a commencé bien plus tôt que prévu, sauf
que tout le monde ignore à ce jour sur base de quel texte de loi aura lieu le
scrutin de 2013.
Le ministre de l’Intérieur a, en ce qui le concerne, la conscience tranquille, estimant avoir fait son devoir en présentant un projet de loi inspiré de la proportionnelle, mais qui tarde encore à être discuté en Conseil des ministres. À plusieurs reprises, Marwan Charbel a mis en garde qui veut l’entendre : il faudra que la nouvelle loi – si nouvelle loi il y a – soit adoptée au moins six mois à l’avance pour permettre à son équipe de mettre en place la logistique nécessaire. Encore faut-il savoir s’il y a une volonté politique réelle d’initier un nouveau mode de scrutin, en l’occurrence la proportionnelle, ou d’introduire les réformes proposées, sachant qu’en 2008, celles-ci ont été pour la plupart grossièrement écartées.
À toutes ces questions, la directrice exécutive de l’Association pour la démocratie des élections (LADE), Yara Nassar, répond, passant en revue la position des différents protagonistes au sujet de la proportionnelle et des réformes principales pour lesquelles plaide la société civile depuis plusieurs années.
D’emblée, l’activiste précise : « Ce n’est pas parce qu’un parti ou une force politique se déclare ouvertement en faveur de la proportionnelle que cela reflète ses intentions réelles. » Autrement dit, nombreux sont ceux parmi les politiques qui applaudissent à la proportionnelle, au nom du réformisme et parce que c’est politiquement correct, sans vouloir nécessairement signifier qu’ils passeront à l’acte.
Il en est ainsi du Hezbollah, qui proclame depuis des années déjà sa préférence pour la proportionnelle appliquée à la circonscription unique, mais qui, dans les coulisses, reconnaît qu’il n’ira pas jusqu’au bout dans la bataille « pour ne pas mécontenter le leader druze Walid Joumblatt », relève Mme Nassar.
Une chose est certaine : le parti chiite, qui constitue un bloc monolithique imperturbable, ne sera pas affecté outre mesure par un nouveau mode de scrutin, encore moins par la proportionnelle. D’où ses propos nuancés en direction de son allié druze qui, lui, a ouvertement rejeté la proportionnelle, « pour des raisons purement électorales ».
« Officiellement, Walid Joumblatt lie l’option de la proportionnelle à l’application d’un panier de réformes, notamment celles qui sont prévues par Taëf, comme le Sénat, par exemple. La réalité est que M. Joumblatt verrait son monopole remis en cause et son poids électoral réduit avec la proportionnelle », rappelle Mme Nassar. C’est le même principe qui s’applique pour le courant du Futur, qui n’a pas caché non plus son rejet pour ce mode de scrutin, le courant sunnite craignant la percée de petites forces marginales qui remettraient en cause sa prépondérance électorale. Le mouvement sunnite déplore également la situation d’inégalité dans laquelle il se retrouve confronté à un Hezbollah armé, que la proportionnelle n’ébranlera pas d’un pouce.
La communauté chrétienne, par contre, qui est scindée en deux parties, le CPL et les FL, n’a pratiquement pas grand-chose à perdre, la proportionnelle ayant sur ses élus pratiquement les mêmes effets que le système majoritaire du fait du clivage qui existe, précise Yara Nassar. D’où les positions respectives des deux formations – publiquement pour le premier, et plus subrepticement pour le second, qui veut ménager ses alliés – en faveur de la proportionnelle.
C’est également une position favorable au vote des Libanais résidant à l’étranger que les FL, le CPL et les Marada affichent depuis un certain temps. « Sauf que ces partis n’ont pas joint l’acte à la parole », note Mme Nassar qui relève qu’aucun de ces partis n’a encore pris des initiatives pour encourager, motiver, voire aider leurs électeurs à s’inscrire dans les ambassades. D’ailleurs, si celles-ci ont déjà envoyé des lettres pour solliciter les inscriptions des électeurs potentiels, rien de plus ne semble avoir été fait à ce jour pour entamer le processus de l’organisation du vote à l’étranger. Ce qui laisse à dire que cette réforme, promise par un certain nombre d’officiels et que M. Charbel a fait figurer dans son projet, n’est pas garantie à ce jour, laisse entendre Mme Nassar.
Autre réforme souhaitée par la société civile, le secret de vote comprenant notamment les bulletins préalablement imprimés qui avaient été rejetés de manière flagrante au Parlement en 2008, quelques mois avant les élections de 2009.
« Au premier tour du scrutin, les voix étaient divisées exactement en moitié : 35 pour, 35 contre. Au second tour, le résultat était de 50 rejets contre 20 approbations », se rappelle Yara Nassar, qui note comment le vote, effectué à main levée, n’avait pas été retransmis devant les caméras, alors qu’il s’agissait d’une séance plénière à l’Assemblée. L’activiste est d’ailleurs convaincue que les chances de voir cette réforme passer ne sont pas plus grandes cette fois-ci.
« Les camps du 8 et du 14 Mars sont désormais rodés au déroulement classique de l’opération électorale (ce qui inclut la fraude notamment). Par conséquent, ils en acceptent les règles du jeu telles qu’elles existent, et refusent les changements majeurs », affirme Yara Nassar, en allusion à leur refus de la proportionnelle, mais aussi des réformes qui pourraient mettre un terme à la corruption électorale.
Pour toutes ces raisons, et dans l’espoir de pouvoir faire pression pour accélérer la prise de décision en matière électorale, la société civile a décidé de se mobiliser dès à présent pour faire campagne. Au menu des revendications : le refus de la loi de 1960 « que l’on représente comme étant la loi du moindre mal », la proportionnelle avec de larges circonscriptions, le plus possible de réformes, dont la mise en place de la commission indépendante pour la supervision des élections, le quota des femmes et la réduction de l’âge de vote.
Dimanche, la société civile entame la première phase de sa mobilisation : une marche regroupant aux côtés de la LADE une soixantaine d’ONG qui soutiennent les réformes électorales, le « mouvement pour la chute du régime confessionnel », le « mouvement en faveur de la laïcité », certaines forces issues de la gauche ainsi que « tous ceux qui sont pénalisés par la non-application de la proportionnelle ». Suivra une campagne de pression sur le Conseil des ministres d’abord, puis sur le Parlement. Ce dernier sera alors sollicité pour mettre les bouchées doubles et voter une nouvelle loi au lieu de se rabattre sur la loi de 1960 revue et corrigée une fois de plus.
Le ministre de l’Intérieur a, en ce qui le concerne, la conscience tranquille, estimant avoir fait son devoir en présentant un projet de loi inspiré de la proportionnelle, mais qui tarde encore à être discuté en Conseil des ministres. À plusieurs reprises, Marwan Charbel a mis en garde qui veut l’entendre : il faudra que la nouvelle loi – si nouvelle loi il y a – soit adoptée au moins six mois à l’avance pour permettre à son équipe de mettre en place la logistique nécessaire. Encore faut-il savoir s’il y a une volonté politique réelle d’initier un nouveau mode de scrutin, en l’occurrence la proportionnelle, ou d’introduire les réformes proposées, sachant qu’en 2008, celles-ci ont été pour la plupart grossièrement écartées.
À toutes ces questions, la directrice exécutive de l’Association pour la démocratie des élections (LADE), Yara Nassar, répond, passant en revue la position des différents protagonistes au sujet de la proportionnelle et des réformes principales pour lesquelles plaide la société civile depuis plusieurs années.
D’emblée, l’activiste précise : « Ce n’est pas parce qu’un parti ou une force politique se déclare ouvertement en faveur de la proportionnelle que cela reflète ses intentions réelles. » Autrement dit, nombreux sont ceux parmi les politiques qui applaudissent à la proportionnelle, au nom du réformisme et parce que c’est politiquement correct, sans vouloir nécessairement signifier qu’ils passeront à l’acte.
Il en est ainsi du Hezbollah, qui proclame depuis des années déjà sa préférence pour la proportionnelle appliquée à la circonscription unique, mais qui, dans les coulisses, reconnaît qu’il n’ira pas jusqu’au bout dans la bataille « pour ne pas mécontenter le leader druze Walid Joumblatt », relève Mme Nassar.
Une chose est certaine : le parti chiite, qui constitue un bloc monolithique imperturbable, ne sera pas affecté outre mesure par un nouveau mode de scrutin, encore moins par la proportionnelle. D’où ses propos nuancés en direction de son allié druze qui, lui, a ouvertement rejeté la proportionnelle, « pour des raisons purement électorales ».
« Officiellement, Walid Joumblatt lie l’option de la proportionnelle à l’application d’un panier de réformes, notamment celles qui sont prévues par Taëf, comme le Sénat, par exemple. La réalité est que M. Joumblatt verrait son monopole remis en cause et son poids électoral réduit avec la proportionnelle », rappelle Mme Nassar. C’est le même principe qui s’applique pour le courant du Futur, qui n’a pas caché non plus son rejet pour ce mode de scrutin, le courant sunnite craignant la percée de petites forces marginales qui remettraient en cause sa prépondérance électorale. Le mouvement sunnite déplore également la situation d’inégalité dans laquelle il se retrouve confronté à un Hezbollah armé, que la proportionnelle n’ébranlera pas d’un pouce.
La communauté chrétienne, par contre, qui est scindée en deux parties, le CPL et les FL, n’a pratiquement pas grand-chose à perdre, la proportionnelle ayant sur ses élus pratiquement les mêmes effets que le système majoritaire du fait du clivage qui existe, précise Yara Nassar. D’où les positions respectives des deux formations – publiquement pour le premier, et plus subrepticement pour le second, qui veut ménager ses alliés – en faveur de la proportionnelle.
C’est également une position favorable au vote des Libanais résidant à l’étranger que les FL, le CPL et les Marada affichent depuis un certain temps. « Sauf que ces partis n’ont pas joint l’acte à la parole », note Mme Nassar qui relève qu’aucun de ces partis n’a encore pris des initiatives pour encourager, motiver, voire aider leurs électeurs à s’inscrire dans les ambassades. D’ailleurs, si celles-ci ont déjà envoyé des lettres pour solliciter les inscriptions des électeurs potentiels, rien de plus ne semble avoir été fait à ce jour pour entamer le processus de l’organisation du vote à l’étranger. Ce qui laisse à dire que cette réforme, promise par un certain nombre d’officiels et que M. Charbel a fait figurer dans son projet, n’est pas garantie à ce jour, laisse entendre Mme Nassar.
Autre réforme souhaitée par la société civile, le secret de vote comprenant notamment les bulletins préalablement imprimés qui avaient été rejetés de manière flagrante au Parlement en 2008, quelques mois avant les élections de 2009.
« Au premier tour du scrutin, les voix étaient divisées exactement en moitié : 35 pour, 35 contre. Au second tour, le résultat était de 50 rejets contre 20 approbations », se rappelle Yara Nassar, qui note comment le vote, effectué à main levée, n’avait pas été retransmis devant les caméras, alors qu’il s’agissait d’une séance plénière à l’Assemblée. L’activiste est d’ailleurs convaincue que les chances de voir cette réforme passer ne sont pas plus grandes cette fois-ci.
« Les camps du 8 et du 14 Mars sont désormais rodés au déroulement classique de l’opération électorale (ce qui inclut la fraude notamment). Par conséquent, ils en acceptent les règles du jeu telles qu’elles existent, et refusent les changements majeurs », affirme Yara Nassar, en allusion à leur refus de la proportionnelle, mais aussi des réformes qui pourraient mettre un terme à la corruption électorale.
Pour toutes ces raisons, et dans l’espoir de pouvoir faire pression pour accélérer la prise de décision en matière électorale, la société civile a décidé de se mobiliser dès à présent pour faire campagne. Au menu des revendications : le refus de la loi de 1960 « que l’on représente comme étant la loi du moindre mal », la proportionnelle avec de larges circonscriptions, le plus possible de réformes, dont la mise en place de la commission indépendante pour la supervision des élections, le quota des femmes et la réduction de l’âge de vote.
Dimanche, la société civile entame la première phase de sa mobilisation : une marche regroupant aux côtés de la LADE une soixantaine d’ONG qui soutiennent les réformes électorales, le « mouvement pour la chute du régime confessionnel », le « mouvement en faveur de la laïcité », certaines forces issues de la gauche ainsi que « tous ceux qui sont pénalisés par la non-application de la proportionnelle ». Suivra une campagne de pression sur le Conseil des ministres d’abord, puis sur le Parlement. Ce dernier sera alors sollicité pour mettre les bouchées doubles et voter une nouvelle loi au lieu de se rabattre sur la loi de 1960 revue et corrigée une fois de plus.
http://www.lorientlejour.com/category/Liban/article/758614/La_LADE_entame_dimanche_sa_campagne_en_faveur_de_la_proportionnelle.html
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