Scarlett Haddad
C'est un coup de maître ! Le cheikh Ahmad al-Assir pris dans les filets de la Sûreté générale dans une opération dite « propre », sans provoquer des remous ni utiliser les méthodes musclées, il fallait tout le professionnalisme et la sagesse du chef de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, pour cela.
Depuis que la nouvelle est tombée, samedi, de la fin de la cavale du cheikh, en fuite depuis plus de deux ans, les versions se sont multipliées dans les médias, chacun racontant à sa manière les détails de l'arrestation. D'après des informations recoupées, il semble toutefois que tout se soit passé de la façon la plus simple possible.
C'est en effet par un coup de fil, alors qu'il se trouvait dans son village au Sud, que le général Ibrahim a été averti de l'arrestation de cheikh al-Assir vers 10h30, samedi 15 août. Il y a quatre mois, la Sûreté générale avait reçu des informations sur l'intention du prédicateur islamiste de quitter le Liban avec un faux passeport donné à un prénommé « Khaled ». L'ordre a donc été donné aux postes de la Sûreté de vérifier l'identité de tous les Khaled. Puis les informations se sont précisées et la Sûreté générale a appris que le faux passeport serait délivré au nom de Khaled Abbassi. Le nom a été transmis à tous les postes. De plus, les informateurs de la Sûreté lui avaient appris que le cheikh al-Assir souhaitait se rendre au Nigeria, car c'est un des rares pays qui accordent un visa sans exiger la présence personnelle de ceux qui présentent la demande. Ahmad al-Assir, alias Khaled Abbassi, aurait donc obtenu son visa par le biais d'une agence de voyages. La Sûreté avait donc enregistré ces données et avait même procédé à des photomontages sur ordinateur pour tenter de deviner à quoi pourrait désormais ressembler le fugitif. Les photos ainsi fabriquées auraient été distribuées aux postes-clés et elles ressembleraient effectivement à l'image qui a circulé du cheikh après son « relookage ».
Samedi matin, Ahmad al-Assir monte donc dans un taxi-service blanc qui l'emmène de Jadra (Chouf) vers l'aéroport. Une fois arrivé, il se dirige vers le comptoir de la compagnie aérienne égyptienne. Il a une valise, un bagage à main et un téléphone portable. Après avoir enregistré son bagage, il arrive au check-point de la Sûreté générale. Il y a une file importante et le cheikh entre dans le rang sans faire de vagues. Une fois qu'il parvient devant le fonctionnaire de la SG, celui-ci lui demande : c'est bien vous Khaled Abbassi ? Le cheikh répond par l'affirmative. Entre-temps, le fonctionnaire envoie par WhatsApp une photo du passeport à son supérieur au siège de la direction générale. Ce dernier constate immédiatement que la signature du responsable de la Sûreté sur le passeport, délivré le 31 juillet 2015 et valable jusqu'à 2018, est fausse. Il envoie ses instructions au fonctionnaire qui demande au cheikh al-Assir de le suivre. « Khaled Abbassi » est emmené dans le bureau du responsable de la Sûreté à l'aéroport et ce dernier lui demande s'il est bien Ahmad al-Assir. « Abbassi » reconnaît sans la moindre difficulté sa véritable identité. Aussitôt, 40 agents de la Sûreté sont déployés autour de l'aéroport, dans la plus grande discrétion, pour empêcher la moindre réaction des partisans du cheikh et éviter que l'un d'eux n'entre dans l'enceinte de l'aéroport avec une ceinture d'explosifs. Il faut préciser que les voyageurs qui se trouvaient cette matinée-là à l'aéroport n'ont rien remarqué, tant les éléments de la Sûreté ont agi avec professionnalisme.
Selon les informations recueillies, le cheikh n'est nullement décontenancé. Au contraire, il propose, semble-t-il, à la Sûreté sa médiation avec le Front al-Nosra pour la libération des militaires enlevés, précisant même que son initiative serait à l'avantage du patron de la Sûreté en charge de ce dossier. Apparemment, il n'a aucun problème à parler et ceux qui l'interrogent commencent immédiatement à enregistrer ses révélations. C'est ainsi qu'ils apprennent qu'il a passé les deux dernières nuits chez un de ses partisans à Jadra.
La Sûreté générale envoie immédiatement une unité pour arrêter la personne que le cheikh a nommée. Mais les fuites ont malheureusement été plus rapides et l'homme en question a pris la fuite. C'est d'ailleurs pourquoi le chef de la Sûreté a demandé aux médias de permettre à l'enquête de se poursuivre discrètement et efficacement.
Ahmad al-Assir avait été un temps la coqueluche des médias qui ne voyaient dans ses péripéties que leur côté spectaculaire, alors que sous des comportements burlesques, il montait une milice qui s'inscrivait dans la lignée des groupes extrémistes, dans son périmètre à Abra (à l'est de Saïda), autour de la mosquée Bilal ben Rabah.
Selon les informations recueillies, le cheikh al-Assir n'aurait fait aucune difficulté à répondre aux questions qui lui étaient posées comme s'il était convaincu que l'épisode de son arrestation finirait par un compromis politique. Pourtant, et c'est là un des grands changements dans la situation générale du pays, aucune partie politique, de celles qui appuyaient ouvertement ou non l'action du prédicateur, n'a critiqué son arrestation, comme cela avait été le cas lors de l'arrestation par la Sûreté générale de Chadi Maoulawi en 2012. Au point que la justice a ordonné la remise en liberté de ce dernier même si, aujourd'hui, il est considéré comme l'un des plus dangereux terroristes libanais. Il est donc clair que les temps ont changé et que la menace que représentent les groupes jihadistes est désormais reconnue par toutes les parties. Reste à savoir jusqu'où iront les aveux du cheikh al-Assir, qui a déversé sa haine pendant des mois contre l'armée et le Hezbollah, enchaînant les provocations et les affrontements armés, avant de prendre la fuite avec certains de ses partisans... Il faudra sans doute attendre sa comparution devant le tribunal militaire pour connaître tous les dessous de cette aventure qui a coûté cher au Liban et à son armée.
C'est un coup de maître ! Le cheikh Ahmad al-Assir pris dans les filets de la Sûreté générale dans une opération dite « propre », sans provoquer des remous ni utiliser les méthodes musclées, il fallait tout le professionnalisme et la sagesse du chef de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, pour cela.
Depuis que la nouvelle est tombée, samedi, de la fin de la cavale du cheikh, en fuite depuis plus de deux ans, les versions se sont multipliées dans les médias, chacun racontant à sa manière les détails de l'arrestation. D'après des informations recoupées, il semble toutefois que tout se soit passé de la façon la plus simple possible.
C'est en effet par un coup de fil, alors qu'il se trouvait dans son village au Sud, que le général Ibrahim a été averti de l'arrestation de cheikh al-Assir vers 10h30, samedi 15 août. Il y a quatre mois, la Sûreté générale avait reçu des informations sur l'intention du prédicateur islamiste de quitter le Liban avec un faux passeport donné à un prénommé « Khaled ». L'ordre a donc été donné aux postes de la Sûreté de vérifier l'identité de tous les Khaled. Puis les informations se sont précisées et la Sûreté générale a appris que le faux passeport serait délivré au nom de Khaled Abbassi. Le nom a été transmis à tous les postes. De plus, les informateurs de la Sûreté lui avaient appris que le cheikh al-Assir souhaitait se rendre au Nigeria, car c'est un des rares pays qui accordent un visa sans exiger la présence personnelle de ceux qui présentent la demande. Ahmad al-Assir, alias Khaled Abbassi, aurait donc obtenu son visa par le biais d'une agence de voyages. La Sûreté avait donc enregistré ces données et avait même procédé à des photomontages sur ordinateur pour tenter de deviner à quoi pourrait désormais ressembler le fugitif. Les photos ainsi fabriquées auraient été distribuées aux postes-clés et elles ressembleraient effectivement à l'image qui a circulé du cheikh après son « relookage ».
Samedi matin, Ahmad al-Assir monte donc dans un taxi-service blanc qui l'emmène de Jadra (Chouf) vers l'aéroport. Une fois arrivé, il se dirige vers le comptoir de la compagnie aérienne égyptienne. Il a une valise, un bagage à main et un téléphone portable. Après avoir enregistré son bagage, il arrive au check-point de la Sûreté générale. Il y a une file importante et le cheikh entre dans le rang sans faire de vagues. Une fois qu'il parvient devant le fonctionnaire de la SG, celui-ci lui demande : c'est bien vous Khaled Abbassi ? Le cheikh répond par l'affirmative. Entre-temps, le fonctionnaire envoie par WhatsApp une photo du passeport à son supérieur au siège de la direction générale. Ce dernier constate immédiatement que la signature du responsable de la Sûreté sur le passeport, délivré le 31 juillet 2015 et valable jusqu'à 2018, est fausse. Il envoie ses instructions au fonctionnaire qui demande au cheikh al-Assir de le suivre. « Khaled Abbassi » est emmené dans le bureau du responsable de la Sûreté à l'aéroport et ce dernier lui demande s'il est bien Ahmad al-Assir. « Abbassi » reconnaît sans la moindre difficulté sa véritable identité. Aussitôt, 40 agents de la Sûreté sont déployés autour de l'aéroport, dans la plus grande discrétion, pour empêcher la moindre réaction des partisans du cheikh et éviter que l'un d'eux n'entre dans l'enceinte de l'aéroport avec une ceinture d'explosifs. Il faut préciser que les voyageurs qui se trouvaient cette matinée-là à l'aéroport n'ont rien remarqué, tant les éléments de la Sûreté ont agi avec professionnalisme.
Selon les informations recueillies, le cheikh n'est nullement décontenancé. Au contraire, il propose, semble-t-il, à la Sûreté sa médiation avec le Front al-Nosra pour la libération des militaires enlevés, précisant même que son initiative serait à l'avantage du patron de la Sûreté en charge de ce dossier. Apparemment, il n'a aucun problème à parler et ceux qui l'interrogent commencent immédiatement à enregistrer ses révélations. C'est ainsi qu'ils apprennent qu'il a passé les deux dernières nuits chez un de ses partisans à Jadra.
La Sûreté générale envoie immédiatement une unité pour arrêter la personne que le cheikh a nommée. Mais les fuites ont malheureusement été plus rapides et l'homme en question a pris la fuite. C'est d'ailleurs pourquoi le chef de la Sûreté a demandé aux médias de permettre à l'enquête de se poursuivre discrètement et efficacement.
Ahmad al-Assir avait été un temps la coqueluche des médias qui ne voyaient dans ses péripéties que leur côté spectaculaire, alors que sous des comportements burlesques, il montait une milice qui s'inscrivait dans la lignée des groupes extrémistes, dans son périmètre à Abra (à l'est de Saïda), autour de la mosquée Bilal ben Rabah.
Selon les informations recueillies, le cheikh al-Assir n'aurait fait aucune difficulté à répondre aux questions qui lui étaient posées comme s'il était convaincu que l'épisode de son arrestation finirait par un compromis politique. Pourtant, et c'est là un des grands changements dans la situation générale du pays, aucune partie politique, de celles qui appuyaient ouvertement ou non l'action du prédicateur, n'a critiqué son arrestation, comme cela avait été le cas lors de l'arrestation par la Sûreté générale de Chadi Maoulawi en 2012. Au point que la justice a ordonné la remise en liberté de ce dernier même si, aujourd'hui, il est considéré comme l'un des plus dangereux terroristes libanais. Il est donc clair que les temps ont changé et que la menace que représentent les groupes jihadistes est désormais reconnue par toutes les parties. Reste à savoir jusqu'où iront les aveux du cheikh al-Assir, qui a déversé sa haine pendant des mois contre l'armée et le Hezbollah, enchaînant les provocations et les affrontements armés, avant de prendre la fuite avec certains de ses partisans... Il faudra sans doute attendre sa comparution devant le tribunal militaire pour connaître tous les dessous de cette aventure qui a coûté cher au Liban et à son armée.
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