04/04/2011
Les incidents, qui ont éclaté samedi matin dans le bâtiment D, se sont étendus par la suite au bâtiment B, aboutissant à une situation chaotique devenue presque familière dans le milieu carcéral. Le scénario était quasiment le même : vitres cassées, portes défoncées, matelas en feu, et prise d'otage d'un gardien de la prison que les détenus ont menacé de tuer si les forces de l'ordre venaient à intervenir. Le début du mouvement a immédiatement donné lieu à des négociations entamées par les forces de l'ordre et les autorités politiques concernées. Les prisonniers réclament la réduction de l'année carcérale à neuf mois, l'adoption d'une loi d'amnistie et l'amélioration des conditions de vie qui, de l'avis de tous les experts, sont extrêmement difficiles dans ce milieu, à cause notamment de la surpopulation des prisons. Conçue à l'origine pour accueillir près de 2 000 détenus, la prison de Roumieh en compte aujourd'hui 3 750.
Le mouvement de protestation, qui semblait au départ relativement contrôlé, se serait envenimé lorsque les informations relatives à l'installation d'équipements permettant de brouiller l'échange d'appels sur les téléphones mobiles introduits illégalement à Roumieh sont parvenues aux prisonniers. Selon certaines sources, la contestation aurait débuté à la suite du refus des détenus du bâtiment D de se soumettre aux nouvelles mesures de fouilles effectuées à l'intérieur des cellules, mesures décidées après que les forces de l'ordre eurent intercepté une quantité de drogue qui se trouvait aux mains des détenus.
La crise a été finalement résolue lorsque les forces spéciales, dépêchées sur les lieux, ont menacé les détenus d'intervenir si ces derniers ne relâchent pas l'otage, s'engageant toutefois à ne pas prendre des mesures punitives contre les protestataires. Parallèlement, les hauts gradés des FSI ont promis d'œuvrer en vue de transmettre les revendications des prisonniers aux autorités concernées. L'affaire s'est soldée par deux blessés légers et le retour au calme était notoire dès la fin de l'après-midi, les prisonniers ayant réintégré leurs cellules.
De leur côté, et à l'issue de deux jours de négociations intensives, « les autorités concernées » ont promis de prendre les mesures adéquates, ainsi que les décisions ne nécessitant pas une modification des textes de loi.
La veille, le ministre de l'Intérieur sortant, Ziyad Baroud, s'était réuni tard en soirée avec le procureur, Saïd Mirza, pour examiner les revendications des prisonniers. M. Mirza avait indiqué qu'il se chargera d'informer l'ensemble des instances judiciaires concernées de la nécessité d'accélérer les mesures d'investigation et les procès et de coordonner avec les Forces de sécurité intérieure pour ce qui est notamment du transfert des détenus devant les tribunaux aux dates prévues. Le procureur s'est également engagé à sommer les instances judiciaires concernées de revoir les demandes de réduction de l'année carcérale et de trancher au cas par cas en fonction des dossiers. Il devra en outre demander aux procureurs dans les mohafazats d'inspecter les prisons et de soumettre des rapports comprenant les revendications des détenus. Rappelons que près de 80 % des détenus à la prison de Roumieh sont toujours en attente d'être jugés, un problème dû à la lenteur des procédures judiciaires, d'où leur mouvement de contestation.
« Ce qui s'est produit est une preuve, une fois de plus, que le laxisme de longue date qui a lieu à l'égard du dossier des prisonniers a transformé ce dernier en une véritable bombe à retardement plaçant un certain nombre de prisonniers en position de victimes nonobstant leur situation judiciaire », a indiqué le ministre de l'Intérieur sortant, Ziyad Baroud. À plus d'une reprise, ce dernier a relevé que le dossier des prisonniers n'était pas du seul ressort de son ministère, mais aussi et surtout de celui de la Justice,laissant entendre que des décisions urgentes doivent être prises par le Conseil des ministres même en période de règlement des affaires courantes.
Lors d'une conférence de presse tenue hier après-midi, le général Rifi a assuré avoir transmis fidèlement les revendications des prisonniers aux autorités judiciaires et politiques, notamment à MM. Baroud et Mirza. « Quant aux demandes qui relèvent du pouvoir législatif, elles lui seront également transmises », a-t-il ajouté.
« Nous avons la possibilité de recourir à la force militaire pour résoudre la crise. Mais nous préférons mettre à profit tous les moyens en vue d'une solution pacifique. Il s'agit après tout de nos propres fils, et de nos proches, et le recours à la violence ne se fera que si l'on y est contraint », a-t-il ajouté quelques heures avant le dénouement de la crise.
« Nous savons pertinemment que la situation est délicate dans les prisons et les solutions seront apportées dans la mesure du possible. L'État a déjà voté un budget de 19 milliards de L.L. pour la construction de deux prisons, l'une au Nord et l'autre au Sud », a indiqué le général Rifi précisant que les appels d'offres ont déjà été faits mais que la finalisation du projet prendra un certain temps.
Les parents des détenus prennent le relais
Parallèlement aux troubles qui agitaient la prison de Roumieh, les proches et parents des détenus ont organisé des manifestations et coupé les routes dans plusieurs localités, notamment la voie menant à l'aéroport, exprimant leur soutien aux revendications formulées par les prisonniers. Les habitants de la localité de Brital ont entrepris de couper l'autoroute qui relie l'ouest à l'est de la Békaa en brûlant des pneus. L'armée, qui est immédiatement intervenue pour rouvrir la route, s'est heurtée aux protestataires qui était armés. Des échanges de tirs ont eu lieu pendant près de 10 minutes. La troupe a fini par contrôler la situation et a réussi à dégager les lieux. Même scénario à Baalbeck.
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