The Lebanese Center for Human Rights (CLDH) is a local non-profit, non-partisan Lebanese human rights organization in Beirut that was established by the Franco-Lebanese Movement SOLIDA (Support for Lebanese Detained Arbitrarily) in 2006. SOLIDA has been active since 1996 in the struggle against arbitrary detention, enforced disappearance and the impunity of those perpetrating gross human violations.

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December 1, 2011

L'orient le jour- Lina Zakharia : Des « détectives » nous ont assuré que mon frère, Iskandar, est en Syrie , December 1, 2011

Par Nada MERHI 




DISPARUS DE GUERRE Le sort de milliers de Libanais – et de ressortissants arabes – disparus durant la guerre civile et la période qui l’a suivie sous la tutelle syrienne au Liban reste inconnu. Pour que ce dossier vieux de plus de trente ans ne reste pas occulté et relégué aux oubliettes, « L’Orient-Le Jour » relatera chaque semaine le témoignage d’un parent en quête de la vérité sur le sort d’un disparu.

Un climat de frénésie règne dans le jardin Gibran Khalil Gibran, place Riad el-Solh, au centre-ville, où les familles des détenus libanais et de ressortissants arabes observent un sit-in depuis plus de six ans. En cette journée, plusieurs journalistes sont venus recueillir pour la énième fois le témoignage des parents, lassés par des dizaines d’années d’attente et d’incertitude, et qui puisent leurs forces du seul espoir de connaître, un jour, la vérité sur le sort des leurs. Pour la énième fois, les parents se prêtent aux interviews et racontent, par des mots qui leur sont devenus familiers, leur calvaire qui se poursuit.
« Mon frère Iskandar a été enlevé en mai 1985, raconte Lina Zakharia. Des hommes armés se sont présentés au seuil de notre appartement situé à Mousseitbé, à proximité de la caserne Hélou. Ils ont expressément demandé à voir Iskandar, se présentant comme agents de la Sécurité de l’État. Ils ont expliqué qu’ils le connaissaient à travers des clients de la Banque britannique pour le Moyen-Orient, aujourd’hui HSBC, où il travaillait, et avaient besoin de lui parler. »

Iskandar, aîné de cette famille de trois enfants, a accompagné les hommes. Il n’est plus jamais rentré. Il avait 27 ans.
Une longue histoire de recherches et d’incertitude, mêlées à l’espoir et l’attente, commence. « Ma mère a tapé aux portes des différents responsables et parties politiques sans pour autant réussir à être fixée sur son sort ou à avoir une seule nouvelle de lui, poursuit Lina Zakharia. Elle a même répondu aux demandes de certains escrocs qui lui avaient promis de lui rapporter des lettres de mon frère, moyennant certaines sommes d’argent. Évidemment, elle n’a rien reçu. »
Après la disparition d’Iskandar, Lina Zakharia et son frère benjamin ont quitté la maison familiale de Mousseitbé et sont venus s’installer dans la « partie Est » du pays. « Nous avions peur pour mon frère, précise-t-elle. Nous nous déplacions d’un hôtel à l’autre. Ma mère est restée seule à Mousseitbé avec feue ma tante. Mon père, lui, est décédé en 1975. Elle venait nous voir les week-ends. Nous ne sommes rentrés qu’après la fin de la guerre, en 1990. »
Depuis la disparition d’Iskandar Zakharia, la famille est restée sans nouvelles. Un événement survenu il y a quelques années a marqué toutefois un tournant dans l’affaire, renouvelant l’espoir d’une rencontre imminente avec le jeune homme. « C’était il y a cinq ou six ans, se souvient Lina Zakharia. Émile Lahoud était encore chef de l’État. C’était un soir de décembre, plus précisément à la Sainte-Barbe. Nous avions du monde, lorsque deux hommes se sont présentés chez nous, expliquant qu’ils étaient des “détectives de l’État”. Ils nous ont expliqué qu’ils rassemblaient des informations sur les personnes disparues, au nombre desquelles figurait mon frère. Ils nous ont affirmé qu’ils étaient sûrs, à plus de 90 %, qu’Iskandar était en Syrie et qu’il devrait sortir. Ils ont toutefois ajouté que l’affaire est longue et qu’il faudrait faire preuve de patience. »
Il s’agit de l’unique information que la famille Zakharia a pu obtenir depuis vingt-six ans que dure son calvaire. « Nous n’avons pas pu voir Iskandar, précise sa sœur. D’ailleurs, où pouvons-nous le chercher en Syrie ? Dans quelle prison ?
À qui s’adresser ? Nous ne connaissons personne qui puisse nous aider auprès des autorités syriennes. »
Depuis ce soir, la famille Zakharia vit en attendant le jour des retrouvailles. « Ma mère a grandi, elle prie Dieu qu’il la garde en vie juste pour revoir Iskandar. Elle a le sentiment qu’il est toujours vivant. J’ai pris la relève. Nous avons soumis le dossier à Solide (Soutien aux Libanais en détention et en exil). Nous participons à toutes les réunions et nous réclamons avec les autres la vérité. Je réitère aussi mon appel au chef de l’État, Michel Sleiman, pour qu’il honore son discours d’investiture dans le cadre duquel il s’était engagé à accorder une importance primordiale au dossier des Libanais détenus en Syrie », conclut Lina. 

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