Un spectacle désolant vient s'ajouter aux monticules de déchets dans les rues depuis trois mois : une nappe pétrolière qui a noirci les plages de Jiyeh et qui flotte sur les flots dans cette zone.
Interrogé sur l'origine de cette pollution, Mohammad Sariji, écologiste et plongeur, membre de l'association Bahr Loubnan, se dit convaincu qu'il s'agit d'une fuite de la centrale électrique toute proche. « Nous constatons régulièrement des fuites de la centrale, mais cette fois, cela fait dix jours que ça dure », affirme-t-il à L'Orient-Le Jour.
Le plongeur, qui avait participé au nettoyage de la mer après la marée noire de 2006 (résultant d'un bombardement israélien de cette même centrale en juillet de cette année), rappelle combien une pollution d'hydrocarbures est dangereuse pour le milieu marin. « Ces grandes nappes pétrolières sont emmenées par les vagues et viennent frapper la plage, dit-il. Bahr Loubnan pense lancer une nouvelle campagne de nettoyage. Que fait la cellule de crise relevant du bureau du Premier ministre dans de pareils cas ? N'est-ce pas une urgence ? »
De son côté, une source bien informée du déroulement des opérations au sein de la centrale nie en bloc ces accusations. « Ces fuites proviennent de bateaux qui vidangent leurs déchets pétroliers en pleine mer, affirme-t-elle. Les vagues ramènent le pétrole vers la plage, d'où cette catastrophe. » Selon cette source, qui a requis l'anonymat, l'utilisation du fuel est très étroitement surveillée dans la centrale, afin d'éviter toute fuite et tout gaspillage.
Mais Mohammad Sariji n'en démord pas et assure avoir la preuve que la fuite provient bien de la centrale. « Des tuyaux mènent l'eau de mer vers les turbines de la centrale, afin de les refroidir, puis en ressortent pour reverser cette eau au large, explique-t-il. C'est au niveau de ces tuyaux de sortie que nous constatons la fuite de mazout. »
D'autres écologistes de la région confirment que la centrale est bien la source de ces fuites, soupçonnant que « des machines seraient en panne, et que leur réparation aurait mal tourné ». « Il y a pourtant des filtres qui sont supposés arrêter la pollution, on ne sait pas s'ils fonctionnent toujours », soulignent-ils.
Entre-temps, les dégâts sont considérables et affectent déjà les plages de Jiyeh, Rmeilé, Jabra et, depuis hier, Saadiyate, selon les écologistes. Des dégâts qui auront des conséquences sur le milieu marin, et qui sont ressentis d'ores et déjà par les pêcheurs.
Un pêcheur de Jiyeh, qui a lui aussi requis l'anonymat, confirme avoir constaté « depuis plus de dix jours » ces fuites « énormes » qui proviennent du tuyau de sortie de la centrale. « Une telle pollution affecte notre travail parce que le fuel flotte à la surface, et que nous n'arrivons plus à voir les profondeurs, explique-t-il. Si nous lançons nos filets par mégarde, ils seront endommagés par le pétrole. D'ailleurs, il n'y a plus de poissons à pêcher, ils fuient tous instinctivement la zone polluée. »
Ce pêcheur indique que plusieurs ports de pêche sont affectés par cette situation : Jiyeh, Saïda, Sarafand...
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