Le président du conseil exécutif des Forces libanaises, Samir Geagea, a qualifié hier de « très dangereux » les propos de Hassan Nasrallah, dans le cadre d'un entretien à la Arabiya moins de deux heures après le discours du secrétaire général du Hezbollah.
M. Geagea a estimé que la déclaration de Hassan Nasrallah et son appel à ne plus coopérer avec les enquêteurs internationaux constituent « une menace » pour l'État libanais, puisque c'est ce dernier qui œuvre le plus avec le TSL en vertu du protocole avec le bureau du procureur, et c'est aussi lui qui assure la protection des enquêteurs, par le biais de l'armée et des FSI. Sans compter que le TSL a été avalisé par le Conseil des ministres, au sein duquel se trouve le Hezb, et la déclaration ministérielle soutient sans équivoque l'action de cette instance et stipule que l'État doit faciliter son action, a-t-il souligné. « Hassan Nasrallah est-il en droit d'appeler les citoyens libanais à ne plus collaborer avec le TSL ? » s'est-il interrogé, dubitatif, avant de rappeler que cette proposition devait, avant d'être proclamée unilatéralement d'un ton péremptoire, être discutée à l'intérieur des institutions. Aussi a-t-il appelé le président de la République à convoquer d'urgence le Conseil des ministres pour discuter de cette question et clarifier les intentions du Hezb et de ses alliés. « Aucune partie n'a le droit de décider seule et au nom des autres. Sayyed Hassan Nasrallah ne peut pas contraindre les Libanais à collaborer ou à ne pas le faire. C'est à eux de choisir. Il a le droit de se retirer du gouvernement s'il le veut, et de faire ce qu'il veut dans le cadre de la loi, mais pas d'imposer sa volonté aux autres », a-t-il souligné.
Samir Geagea a en outre exprimé une grande inquiétude par rapport à la situation dans la région. « Le Liban aurait pu être hors de portée si le Hezbollah était, à la limite, une milice totalement libanaise. » Or le Hezb s'inscrit, a-t-il dit, dans le cadre des visées iraniennes au Proche-Orient et sur le plan international. « Le Liban est donc malheureusement au cœur d'un danger qui ne le concerne pas directement », a-t-il ajouté. Et de poursuivre, en réponse à une question sur une extension du conflit à la Syrie : « Il se peut aussi que la Syrie soit également visée. Mais le Hezb peut encore mettre le Liban à l'abri. Il suffit d'abandonner à l'État le monopole de la violence. »
En réponse à une autre question, M. Geagea a affirmé qu'il était radicalement contre la démission de Saad Hariri. « Il faut qu'il reste Premier ministre et qu'il dise qu'il n'accepte plus, désormais, de les caresser dans le sens du poil comme cela a été le cas jusqu'à présent. Il ne faut pas se faire d'illusions, même s'il démissionne, ils prendront le pouvoir et placeront le Premier ministre qu'ils souhaitent » et s'attacheront à « n'importe quel pouvoir en papier ». « Mais Saad Hariri n'est pas prêt à démissionner », a-t-il souligné, en réponse aux articles parus dans la presse saoudienne appelant le Premier ministre libanais à rendre son tablier.Samir Geagea a férocement défendu son allié, estimant que les déclarations de ce dernier au Charq el-Awsat avaient pour but de sauver le pays, et que la réponse avait été les 33 mandats d'arrêt syriens. « Si le président syrien Assad est sérieux et qu'il souhaite réellement la stabilité du Liban, qu'il appelle demain sayyed Nasrallah et lui dise combien son dernier discours est déstabilisateur pour le pays », a-t-il dit.
Le chef des FL a également exprimé son soutien inconditionnel au TSL, estimant qu'il ne saurait y avoir de stabilité sans que tombe l'impunité sur les crimes politiques commis au Liban depuis 1975. Estimant que la véritable force est « politique », et non « militaire », il a estimé qu'en cas d'un nouveau 7 mai 2008, « nous ne nous rendrons pas ». « Doha n'aurait pas dû avoir lieu. C'était une erreur. Il aurait fallu refuser de faire quoi que ce soit avant que le Hezb ne retire ses miliciens de la rue. Cette erreur, nous ne la commettrons pas de nouveau. D'ailleurs, ils auraient eu quelques lambeaux de la légalité. Et après ? » a-t-il noté. Mais Samir Geagea a estimé que la conjoncture est totalement différente aujourd'hui, tant du point de vue local que régional ou international : « Il existe des institutions aujourd'hui : il y a un président de la République, un gouvernement, une armée, etc. Tout cela n'était pas pleinement réalisé en 2008. Nous nous en remettons aux institutions. Si nous sommes attaqués, notre position est claire, nous nous adresserons aux autorités institutionnelles concernées. C'est à elles de nous protéger. » « Je suis sous la protection de l'armée », a-t-il indiqué, précisant que sa véritable protection provient de l'institution militaire « en qui j'ai placé toute ma confiance », et démentant toutes les rumeurs selon lesquelles les FL seraient en train de s'entraîner ou de s'armer. Il a estimé, dans ce cadre, que la véritable force du 14 Mars, face aux armes, c'est l'opinion publique. « Personne ne peut nous faire peur ou nous obliger à faire quoi que ce soit. J'ai fait onze ans de prison, rappelez-vous, parce que j'ai refusé de céder », a-t-il dit. « Depuis 2005, c'est parce que nous avons abandonné les armes que nous sommes forts. C'est notre combat politique qui nous renforce. D'ailleurs, les armes finissent toujours par se retourner contre ceux qui les portent. Regardez le Hezbollah aujourd'hui : ses armes jouent contre lui », a souligné Samir Geagea.
Il a estimé, dans ce cadre, que malgré sa volonté « d'être bien avec tout le monde », le président de la République avait pris les positions de principe tant concernant l'affaire des « faux témoins » que dans sa condamnation de l'incident d'Ouzaï, mercredi. « Cela veut dire qu'il distingue très bien entre le rôle de la résistance à la frontière et ce qui se produit à l'intérieur », a-t-il noté.
Samir Geagea a indiqué qu'il n'a pas de relations avec la Syrie à l'heure actuelle. « Ceux qui en avaient ont fini par baisser les bras. L'expérience de l'année écoulée a été particulièrement décevante », a-t-il indiqué. Et de conclure : « Saad Hariri a payé beaucoup de son crédit personnel dans cette affaire, et la Syrie n'a pas modifié d'un iota son attitude par rapport au Liban. Comment espérer établir une relation d'égal à égal ? Les Syriens ne sont pas prêts. Pour eux, si l'on n'accepte pas que le Liban est une province syrienne, c'est le bâton. Et ce bâton, sur nos têtes, c'est le Hezbollah. »


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