The Lebanese Center for Human Rights (CLDH) is a local non-profit, non-partisan Lebanese human rights organization in Beirut that was established by the Franco-Lebanese Movement SOLIDA (Support for Lebanese Detained Arbitrarily) in 2006. SOLIDA has been active since 1996 in the struggle against arbitrary detention, enforced disappearance and the impunity of those perpetrating gross human violations.

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October 12, 2010

L'Orient le Jour - Mitri : Il faut vivre avec les tensions que crée l’équation paix civile vs justice - October 12, 2010

INTERVIEW « Les Libanais ont peur parce qu'on leur fait peur. »

Tarek Mitri est sans doute l'un des cerveaux les plus redoutables de la majorité : dans sa faculté d'analyse et dans cette espèce de primauté (de suprématie, même...) constante et urgente qu'il accorde au concept de l'État à chaque fois qu'il lui est demandé de faire quelque chose. Redoutable, le père de la 1701, parce qu'absolument pas partisan : juste défenseur acharné de l'État et de ses corollaires : démocratie, libertés, droit, lois, dignité, etc. Entretien à la veille d'un Conseil des ministres pas ordinaire et en attendant la publication, un jour, de l'acte d'accusation...

Est-ce que les Libanais ont raison d'avoir peur ? « Ils ont peur parce qu'on leur fait peur », s'insurge le ministre de l'Information, critiquant ceux qui déclarent « révéler des informations concernant la fitna pour mieux la déjouer : ils ne révèlent pas ; ils exagèrent et parfois ils inventent ». Déplorant les logorrhées prophétiques de mauvais augure, « cette peur de la fitna accélère l'avènement de ce dont on a peur », il évoque ce « renversement de perspectives et de dynamique » et rappelle l'élémentaire : « Si l'on craint la discorde, il faut tout faire pour l'empêcher. » Comment ? « En refusant net la vengeance ; en refusant de la diriger contre d'autres Libanais dont le seul crime est d'avoir réclamé la justice ; en s'engageant à s'abstenir de toutes représailles, comme Saad Hariri l'a fait. La justice que l'on appelle de nos vœux est restauratrice, pas punitive », insiste Tarek Mitri.
Pourquoi cette métallique grammaire de la peur de la part du camp du 8 Mars ? « Cette périodicisation plus ou moins régulière de nos tensions et de nos détentes a nui à notre psychologie collective (pas encore à notre économie, mais cela n'est pas loin), mais elle a surtout lésé notre lucidité politique et notre capacité de dialogue. Leur but est de faire pression sur le Premier ministre afin qu'il insiste auprès de ses amis en faveur d'un report sine die de l'acte d'accusation. En même temps, ils savent qu'il y a quelque chose d'irrévocable. » D'où d'éventuels dérapages sur le terrain ? « J'ai du mal à croire qu'un acte d'accusation puisse justifier des actes de violence contre des Libanais, de la désobéissance civile ou de la contestation ; du mal à croire que cette stratégie de montée unilatérale aux extrêmes puisse aller jusqu'au bout. » Grâce aux promesses de Saad Hariri ? « Le PM a été très clair lorsqu'il s'est engagé à sauvegarder la stabilité et la paix civile, lorsqu'il a répété qu'il fera tout pour éviter la violence. Il est très conscient de la primauté de la paix civile. » Au détriment de la justice et de la vérité ? « Saad Hariri a un engagement et un droit, non personnel, de réclamer la justice, une justice non privée et non privatisable. Le débat planétaire concernant la primauté de la paix sur la justice ou vice-versa est interminable et cela crée des tensions jamais résolues. Il faut apprendre à vivre avec ces tensions. Saad Hariri le fait et nous aide à le faire. »

La « maturité politique » de Hariri

Beaucoup, même parmi les fervents supporters du 14 Mars, jugent le Premier ministre « mollasson et frileux » sur cette question. « Saad Hariri fait preuve à ce niveau d'une grande maturité politique. Accusé par un ministre du 8 Mars lors du précédent Conseil de fuir le débat sur les faux témoins (un ministre qui lui a reconnu le droit, l'obligation même selon les us mahométanes, de réclamer justice pour celui dont il est l'héritier, mais qui lui a asséné que le Hezbollah n'acceptera pas d'être opprimé comme l'ont été les quatre généraux), le Premier ministre a répondu qu'il était tout à fait d'accord pour un débat global en Conseil des ministres à condition que cessent les agressions, les menaces et les accusations de traîtrise et à condition d'en finir avec cet insupportable ou bien... ou bien... : ou vous faites comme nous voulons ou ce sera la fitna... Si Nabih Berry, Hassan Nasrallah et moi-même ne voulons pas de fitna, il n'y aura pas de fitna. J'ai fait mon autocritique le 6 septembre, et vous, au lieu de faire la même chose, vous m'avez attaqué », raconte Tarek Mitri.
Et de déplorer que « certains » misent « sur ça, sur notre attachement viscéral à la paix civile ; ces gens-là espèrent que cette quasi-fusion nous poussera à choisir, à oublier les impératifs de vérité et de justice, à rechercher des compromis, comme au temps de l'ex-Yougoslavie ». Y aurait-il un deal, plus de TSL en contrepartie d'un règlement avec l'Iran, d'un règlement de la question des armes du Hezb ? « Rien n'indique que nous en soyons là », répond le ministre de l'Info, jugeant au passage « naïve et pas intelligente » la proposition faite par certains milieux : que le gouvernement prie le TSL de retarder la publication de l'acte d'accusation jusqu'à ce qu'un magistrat libanais, qui prendrait en main le dossier des faux témoins, finisse son travail... « Naïve et pas intelligente. » Tout est dit, en deux épithètes. 

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