Demain, dimanche, aura lieu la 3e édition de la
« Laïque Pride ». Cette marche pour la laïcité débutera à 16h au
jardin de Sanayeh, en direction de la corniche de Aïn el-Mreissé. C’est une
impression de printemps qui s’en dégage chaque année. Les fleurs parsèment le
cortège. Des banderoles fluorescentes raillent le confessionnalisme. Les
sourires des manifestants se mêlent aux slogans chantés. « Cette marche
dégage une positivité qui n’existe pas ailleurs », fait remarquer Kinda
Hassan, artiste de son et d’image, coorganisatrice de la « Laïque
Pride ».
Bel emballage pour des sentiments pourtant moroses. Asphyxiés, lésés par un système qui les broie, les manifestants appelleront demain à ne pas s’y résigner. Loin d’eux l’idée d’une révolte anarchique, d’une contestation arbitraire. Ils veulent uniquement se réapproprier leur voix en tant que citoyens. Yalda Younès, qui participe à la planification de la marche, affirme que « l’enjeu est de responsabiliser le citoyen ». Et ce n’est pas peu dire dans un système où la compétence des dignitaires religieux sur les statuts personnels ainsi que les coutumes du clientélisme politique donnent l’impression que le citoyen est sans voix, presque sans consistance. Les Libanais s’enlisent aujourd’hui dans « une apathie », déplore Alexandre Paulikevitch, coorganisateur.
Une attitude d’abandon généralisée dresse des obstacles à la marche. « Nous ne sommes pas politisés et certains partis ont tenté, en vain, de nous récupérer. Notre seul sponsor est un fleuriste ! » affirme-t-il avec un rire. Un point de force, sans doute, mais qui accroît le défi de pouvoir réunir le plus grand nombre de personnes. L’interprète de danse contemporaine explique que « beaucoup sont découragés de participer à la Laïque Pride à défaut d’être soutenue par quelque partie politique ». « Cela ne leur plaît pas parce qu’ils attendent que quelqu’un leur mâche le boulot et les force à l’ingurgiter ! » dénonce-t-il clairement.
De prime abord, le refus de prendre part à la marche paraît injustifié, d’autant qu’elle rallie des ONG qui mènent campagne pour des réformes favorables aux droits de l’homme, à la liberté d’expression, l’État de droit. Yalda Younès énumère les « six projets concrets que nous soutenons cette année », parmi lesquels le vote de la loi contre la violence domestique sans dénaturer le texte proposé par l’association KAFA, l’abolition de l’article 522 du code pénal qui dépénalise le viol s’il est suivi du mariage du violeur et de la victime, le vote de la proposition de loi qui interdit la censure préalable sur les productions de cinéma et de théâtre, l’adoption d’un statut personnel civil unifié... « Qui est contre ces propositions ? » se demande Yalda Younès. Certes, celles-ci sont des reflets, encore précaires, de la laïcité voulue. Mais les réserves de certains sur la Laïque Pride sont liées plutôt à la laïcité en soi, sur laquelle ils portent des idées reçues. Élan d’utopie vain, slogan sans consistance, ou encore incitation à l’athéisme, et pourquoi pas, à la débauche. Autant d’a priori incrustés dans l’esprit de ceux qui se confinent dans un confort moral du système.
C’est pourquoi, cette année, les organisateurs ont décidé de terminer la marche sur un échange similaire aux rencontres de Hyde Park. Chaque citoyen désireux de s’exprimer prendra la parole pendant une minute, sur une petite tribune frayée sur les dalles de la corniche, pour répondre à la question : « Comment changeriez-vous le Liban ? » « C’est un exercice de liberté de parole et de tolérance de l’autre », affirme Yalda Younès. « Notre force est que nous ne sommes pas contre quoi que ce soit, mais pour », insiste-t-elle.
« Ceux qui s’opposent à la Laïque Pride sont les laïcs eux-mêmes. » Une allusion à peine voilée au mouvement qui visait, l’année dernière, à « faire chuter le système confessionnel ». Ce mouvement s’inscrivait dans l’élan régional pour le changement, mais souffrait de mêler les demandes socio-économiques à l’enjeu de laïcité, et, surtout, d’avoir été récupéré par des partis politiques, notamment Amal et le PSNS, comme le reconnaissent plusieurs participants à cette campagne avortée. Elle avait néanmoins affadi la Laïque Pride l’année dernière, trahissant une absence de solidarité, sinon de coordination, entre deux mouvances aux enjeux pourtant similaires. Interrogés sur la question, les organisateurs de la Laïque Pride ont déploré le fait que « ceux qui s’y opposent sont les laïcs eux-mêmes ! » Il n’existe pas en effet d’appui officiel à la Laïque Pride par les mouvements qui s’en rapprochent le plus, comme la campagne contre le système confessionnel, ou encore le mouvement Chaml qui œuvre pour l’adoption du mariage civil. Kinda Hassan insiste néanmoins sur le fait que « la société civile se révèle de plus en plus active d’année en année, bien qu’éparpillée et peu unifiée ». La Laïque Pride se veut une plateforme d’ouverture, de critique, d’éveil, « d’horizons nouveaux », affirme Alexandre. Yalda donne l’exemple de Rami, originaire de Baalbeck, qui a pu réunir dans la ville conservatrice 36 participants à la marche en un jour. Et Kinda de conclure : « Notre consistance définit notre efficacité. Notre force est cumulative. » Demain, nouvelle épreuve.
Bel emballage pour des sentiments pourtant moroses. Asphyxiés, lésés par un système qui les broie, les manifestants appelleront demain à ne pas s’y résigner. Loin d’eux l’idée d’une révolte anarchique, d’une contestation arbitraire. Ils veulent uniquement se réapproprier leur voix en tant que citoyens. Yalda Younès, qui participe à la planification de la marche, affirme que « l’enjeu est de responsabiliser le citoyen ». Et ce n’est pas peu dire dans un système où la compétence des dignitaires religieux sur les statuts personnels ainsi que les coutumes du clientélisme politique donnent l’impression que le citoyen est sans voix, presque sans consistance. Les Libanais s’enlisent aujourd’hui dans « une apathie », déplore Alexandre Paulikevitch, coorganisateur.
Une attitude d’abandon généralisée dresse des obstacles à la marche. « Nous ne sommes pas politisés et certains partis ont tenté, en vain, de nous récupérer. Notre seul sponsor est un fleuriste ! » affirme-t-il avec un rire. Un point de force, sans doute, mais qui accroît le défi de pouvoir réunir le plus grand nombre de personnes. L’interprète de danse contemporaine explique que « beaucoup sont découragés de participer à la Laïque Pride à défaut d’être soutenue par quelque partie politique ». « Cela ne leur plaît pas parce qu’ils attendent que quelqu’un leur mâche le boulot et les force à l’ingurgiter ! » dénonce-t-il clairement.
De prime abord, le refus de prendre part à la marche paraît injustifié, d’autant qu’elle rallie des ONG qui mènent campagne pour des réformes favorables aux droits de l’homme, à la liberté d’expression, l’État de droit. Yalda Younès énumère les « six projets concrets que nous soutenons cette année », parmi lesquels le vote de la loi contre la violence domestique sans dénaturer le texte proposé par l’association KAFA, l’abolition de l’article 522 du code pénal qui dépénalise le viol s’il est suivi du mariage du violeur et de la victime, le vote de la proposition de loi qui interdit la censure préalable sur les productions de cinéma et de théâtre, l’adoption d’un statut personnel civil unifié... « Qui est contre ces propositions ? » se demande Yalda Younès. Certes, celles-ci sont des reflets, encore précaires, de la laïcité voulue. Mais les réserves de certains sur la Laïque Pride sont liées plutôt à la laïcité en soi, sur laquelle ils portent des idées reçues. Élan d’utopie vain, slogan sans consistance, ou encore incitation à l’athéisme, et pourquoi pas, à la débauche. Autant d’a priori incrustés dans l’esprit de ceux qui se confinent dans un confort moral du système.
C’est pourquoi, cette année, les organisateurs ont décidé de terminer la marche sur un échange similaire aux rencontres de Hyde Park. Chaque citoyen désireux de s’exprimer prendra la parole pendant une minute, sur une petite tribune frayée sur les dalles de la corniche, pour répondre à la question : « Comment changeriez-vous le Liban ? » « C’est un exercice de liberté de parole et de tolérance de l’autre », affirme Yalda Younès. « Notre force est que nous ne sommes pas contre quoi que ce soit, mais pour », insiste-t-elle.
« Ceux qui s’opposent à la Laïque Pride sont les laïcs eux-mêmes. » Une allusion à peine voilée au mouvement qui visait, l’année dernière, à « faire chuter le système confessionnel ». Ce mouvement s’inscrivait dans l’élan régional pour le changement, mais souffrait de mêler les demandes socio-économiques à l’enjeu de laïcité, et, surtout, d’avoir été récupéré par des partis politiques, notamment Amal et le PSNS, comme le reconnaissent plusieurs participants à cette campagne avortée. Elle avait néanmoins affadi la Laïque Pride l’année dernière, trahissant une absence de solidarité, sinon de coordination, entre deux mouvances aux enjeux pourtant similaires. Interrogés sur la question, les organisateurs de la Laïque Pride ont déploré le fait que « ceux qui s’y opposent sont les laïcs eux-mêmes ! » Il n’existe pas en effet d’appui officiel à la Laïque Pride par les mouvements qui s’en rapprochent le plus, comme la campagne contre le système confessionnel, ou encore le mouvement Chaml qui œuvre pour l’adoption du mariage civil. Kinda Hassan insiste néanmoins sur le fait que « la société civile se révèle de plus en plus active d’année en année, bien qu’éparpillée et peu unifiée ». La Laïque Pride se veut une plateforme d’ouverture, de critique, d’éveil, « d’horizons nouveaux », affirme Alexandre. Yalda donne l’exemple de Rami, originaire de Baalbeck, qui a pu réunir dans la ville conservatrice 36 participants à la marche en un jour. Et Kinda de conclure : « Notre consistance définit notre efficacité. Notre force est cumulative. » Demain, nouvelle épreuve.
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