Face aux demandes de l'ex-opposition, le chef des Forces libanaises a réclamé hier que la question de l'arsenal du Hezbollah soit déférée devant la Cour de justice. Le chef du comité exécutif des FL, Samir Geagea, a tenu hier une conférence de presse au cours de laquelle il s'est employé à démonter l'argumentation du 8 Mars au sujet de l'affaire dite des faux témoins, soulignant notamment que cette affaire n'existe pas encore et qu'elle ne saurait exister avant un verdict du TSL. Déniant à la Cour de justice toute compétence en la matière, il a réclamé, en revanche, que cette instance soit saisie de la question des armes du Hezbollah. Et de conclure en mettant en garde l'ex-opposition contre une probable radicalisation du Premier ministre, Saad Hariri, à son égard.
Avant d'entamer sa conférence de presse, M. Geagea a rendu hommage à trois des journalistes présents, Omar Harkous, Ayman Charrouf et Abdessalam Moussa, tous trois faisant partie de la liste des personnes visées par des mandats d'arrêt syriens.
« Le véritable objectif de la partie adverse n'est pas de corriger le cours du TSL ni de combler les brèches, régler l'affaire des faux témoins ou rectifier la justice, parce que nous savons comment était la justice à leur époque », a-t-il déclaré. Selon lui, « ils ne sont pas non plus animés par le souci d'assurer l'authenticité et la précision des verdicts, mais simplement par leur rejet du tribunal ».
« Certains d'entre eux s'étaient efforcés de se sauver la face dans leurs prises de position au sujet du TSL, mais il y en a un qui, n'ayant pas de face à sauver, a claironné que le tribunal et sa chaussure, c'était la même chose », a ajouté M. Geagea, dans une allusion à l'ancien ministre Wi'am Wahhab. « Le fait est que le but est le même dès le premier instant : le Hezbollah et ses alliés intérieurs comme extérieurs ne veulent pas du TSL », a-t-il dit, rappelant que « lorsque les quatre officiers avaient été relaxés, ils prétendaient déjà que le tribunal était politisé ».
« N'est-il pas tout à fait naturel de concevoir des soupçons à l'égard de ceux qui ont diffusé la vidéo d'Abou Adass et de ceux qui ont manipulé la scène du crime ? » s'est-il interrogé avant d'aborder la question des faux témoins. M. Geagea a noté que cette appellation figure dans les articles 408 et 409 du code pénal libanais et que l'article 409 stipule qu'un témoin qui se rétracte avant un jugement n'est pas passible de sanctions. « C'est pourquoi, il ne nous est pas possible de parler de faux témoins avant qu'un verdict ne soit rendu », a-t-il fait valoir.
« Personne ne peut donc parler de cette question avant la fin du procès, car tant que le juge aura, ne serait-ce qu'un pour cent de doute, il n'y aura pas de verdict. Partant de là, sur quoi se baserait-on pour dire que tel et tel sont des faux témoins ? » a-t-il demandé.
Et de poursuivre : « Ils affirment que la relaxe des quatre officiers est la plus grande preuve de l'existence de faux témoins. Ils ne savent donc pas que les quatre avaient été libérés pour manque de preuves suffisantes contre eux. Comment les quatre officiers ont-ils su sur quoi s'était fondé le juge d'instruction pour ordonner leur arrestation ? Lorsque quelqu'un se rend sur la scène du crime, change la disposition des voitures et se livre à des manipulations, n'est-il pas normal d'orienter les soupçons vers lui ? Le juge d'instruction n'avait-il pas dans son esprit un pour cent de doute pour décider d'arrêter les généraux Jamil Sayyed et Ali el-Hajj ? »
« Seule une instance judiciaire est en mesure de qualifier un individu de faux témoin », a souligné M. Geagea. « Par exemple, nous ne pouvons pas dire que Nasser Kandil est un faux témoin, en dépit de ses calomnies permanentes à notre égard. »
Les armes du Hezbollah
« Le rapport établi par le ministre de la Justice leur a déplu. Faut-il qu'une étude soit à leur goût pour mériter leur aval ? À la suite de ce rejet, ils ont réclamé que l'affaire soit déférée devant la Cour de justice. La question qui se pose est de savoir s'il y a déjà une affaire pour qu'elle soit déférée devant la Cour de justice », a-t-il dit. « Je le répéterai en permanence : il n'y a pas, jusqu'ici, de faux témoins ni de faux témoignages. De plus, s'agissant d'un tribunal d'exception, on ne peut pas ergoter sur ses compétences. Or il s'est avéré, d'après l'étude du ministre de la Justice, avec les instances concernées que la Cour de justice n'est pas compétente en la matière. »
En tout état de cause, a-t-il ajouté, « peut-on considérer que le témoignage de Mohammad Zouheir al-Siddiq porte atteinte à l'unité nationale ou est la cause d'une guerre civile ? Ce n'est pas la théorie des faux témoins qui est la cause de la discorde, c'est vous-mêmes, dans la mesure où il n'y a pas d'affaire des faux témoins ».
« À nos yeux, la plus grande cause de discorde dans le pays réside dans l'arsenal du Hezbollah. Pourquoi alors ne défère-t-on pas cette question devant la Cour de justice ? Que s'est-il passé à Bourj Abi Haïdar, et le 7 mai (2008), et le 23 janvier (2007) ? Il y a eu des crimes insolents et des morts. Qu'on les défère devant cette instance », a-t-il martelé.
Répliquant à des propos du chef du bloc parlementaire du Hezbollah, Mohammad Raad, qui se demandait pourquoi n'a-t-on pas pris en considération les indices présentés par son parti sur l'implication d'Israël, M. Geagea a lancé : « Mais qui vous dit que le tribunal n'a pas pris ces indices en compte ? »
« Ils essaient et ils continueront d'essayer. Mais le TSL ne disparaîtra pas. Quant à nous, nous resterons attachés jusqu'à la fin à tout ce en quoi nous croyons. C'est à la partie adverse de ne pas se tromper dans ses calculs. Il est vrai que notre méthode est douce, mais nous sommes là et nous avons la force politique nécessaire pour rester constants », a-t-il dit, avant d'ajouter : « Il y a aujourd'hui une donnée parfaitement incontournable, Saad Hariri est le chef du gouvernement et le restera. Et de sa part, la prochaine étape sera peut-être placée sous le signe de la non-complaisance. »
M. Geagea a toutefois affirmé la disposition de la majorité à conclure avec la partie adverse, « au moment où elle le désire », un accord consistant à ne plus évoquer le TSL dans les déclarations politiques. Selon lui, « il n'y aura absolument pas de bazar entre le tribunal et la stabilité ». « Nous allons nous efforcer de préserver les deux à la fois », a-t-il dit, écartant l'éventualité d'une détérioration de la situation sur le terrain.


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