À la manière d’une traînée de poudre, les incidents se
propagent du nord au sud, entraînant dans leur sillage les mouvements de
protestation aux connotations parfois sociales, parfois économiques, lorsqu’ils
ne sont pas d’ordre purement sécuritaire, comme cela s’est vu dans les camps,
ou impliquant une dimension transfrontalière, comme c’est le cas avec les
pèlerins chiites enlevés en Syrie il y a plusieurs semaines.
Sujet tabou par excellence tant il rappelle les épisodes tragiques de la guerre et les relations mouvementées entre Libanais et Palestiniens, le dossier des camps des réfugiés est revenu en force ces derniers jours sur une scène politique de plus en plus fragilisée.
Prenant le relais des réfugiés du camp de Nahr el-Bared, qui ont fait face plusieurs jours durant à l’armée libanaise, les Palestiniens de Aïn el-Héloué ont poursuivi hier leur mobilisation contre la troupe, dans un mouvement dit de « solidarité » avec leurs frères du Nord. Cette contagion subite entre les deux camps – dont certains, à l’instar du ministre Ahmad Karamé et de l’ancien député Moustapha Allouche, redoutent la propagation à d’autres camps de réfugiés, voire même à d’autres régions libanaises – soulève de nombreuses interrogations quant à son timing et à l’identité des auteurs de ces incidents, ou du moins leurs commanditaires.
Si l’on en croit les déclarations officielles des responsables palestiniens, aucune faction n’a en effet intérêt à en découdre avec l’armée libanaise et à remettre en cause le modus vivendi qui prévalait jusque-là entre les deux parties, comme ils disent. À Aïn el-Héloué et à Nahr el-Bared, les représentants officiels des différentes factions palestiniennes se sont empressés d’exprimer leur attachement à la stabilité dans les camps ainsi que leur volonté d’entretenir « les meilleures relations » avec le peuple libanais et la troupe. Cela pourrait probablement expliquer, sans pour autant résoudre l’énigme, le doigt pointé vers une « cinquième colonne palestinienne », accusée par le commandant en chef de l’armée, le général Jean Kahwagi, d’être à l’origine des heurts et d’œuvrer nuit et jour à faire échec aux médiations effectuées par les parties officielles palestiniennes.
Le commandant de l’armée est en tous les cas certain qu’une tierce partie est intervenue pour saboter la relation palestino-libanaise alors qu’un accord venait d’être mis au point pour juguler les toutes premières conséquences de l’incident de Nahr el-Bared. En tout état de cause, un second accord aurait été convenu hier entre l’armée et les responsables palestiniens à Nahr el-Bared, pour calmer le jeu. Il prévoit de mettre en place un comité d’investigation chargé d’enquêter sur la mort des deux Palestiniens tués lors des heurts de ces derniers jours avec la troupe. Il stipule également le retrait des armes et la remise en liberté des 11 détenus arrêtés ces derniers jours. Il reste à savoir cependant dans quelle mesure son application sera possible à la lumière de la tension qui continuait de prévaloir en soirée.
À Aïn el-Héloué, le comité en charge de la sécurité dans les camps n’a pas voulu baisser les bras non plus. Afin de prouver sa bonne volonté, le comité s’est ainsi engagé à placer des points de contrôle militaires à chaque embranchement qui se trouve près d’un barrage de l’armée libanaise, pour éviter précisément un face-à-face entre les manifestants et la troupe. Une mesure qui semble avoir réussi partiellement, puisqu’en début de soirée, les protestataires sont revenus à la charge, alors que se déroulaient les obsèques de Khaled Youssef, brûlant des pneus et scandant des slogans hostiles à l’armée.
Le mécontentement populaire ne s’est pas limité aux camps des réfugiés. Un peu partout dans le pays, la manie des sit-in, des routes coupées et des pneus brûlés battait son plein. Après les familles des pèlerins chiites enlevés à Alep, qui ont barré, lundi, le chemin aux voyageurs pressés de prendre leur avion, c’était au tour hier des habitants du Akkar de protester contre les coupures d’électricité en bloquant les voies de passage dans plusieurs localités. En soirée, des mouvements de protestation similaires, contre le rationnement de l’électricité, ont été signalés à Choueifat, Aramoun, ainsi que dans le secteur de la galerie Semaan, à l’entrée de la banlieue sud.
Plus loin, dans la capitale du Nord, et sur un tout autre plan, les islamistes se sont rebiffés dès qu’ils ont su qu’une partie, seulement, des leurs avaient été relâchés, et non la liste escomptée qui devait, selon eux, englober notamment un responsable religieux, Tarek Merhi. Les manifestants, qui ont réinvesti la place centrale de la capitale du Nord, n’ont pas hésité à rappeler que ce sont les 180 détenus qui doivent être relâchés et non pas seulement les quatorze que la justice a accepté de relaxer après le paiement, par le Premier ministre Nagib Mikati, d’une caution. Et le représentant des islamistes, cheikh Salem Rifai, de mettre en garde contre toute « injustice » et contre le risque de discorde, laissant entendre, sans le nommer, que le général Fayez Karam, proche collaborateur de Michel Aoun et accusé d’espionnage pour le compte d’Israël, avait été relâché peu de temps après son arrestation. Une politique de deux poids, deux mesures qu’ils entendent dénoncer à leur manière, promettant de revenir à la mode du blocage des axes routiers.
De l’autre côté de la ville, sur la rue de Syrie, et en dépit des médiations effectuées au plus haut niveau entre sunnites et alaouites, l’armée se prépare à un éventuel nouveau round de violences. Pour la première fois depuis plusieurs années de tension intercommunautaire, des miradors en ciment ont été érigés par la troupe en plusieurs points de la rue qui sépare Bab el-Tebbaneh de Jabal Mohsen. Des deux côtés du front, les deux milices restent sur leurs gardes. Pour les sunnites, aucune solution n’est envisageable « tant que le gang de Rifaat Eid (le secrétaire général du Parti arabe démocrate alaouite) n’a pas évacué les lieux avec ses hommes ». Ces derniers, de leur côté, qui s’estiment encerclés par les sunnites, affirment que la cassure entre les deux camps rivaux restera vive « tant que la situation en Syrie ne se sera pas décantée ». Le retour au calme n’est pas pour demain.
Sujet tabou par excellence tant il rappelle les épisodes tragiques de la guerre et les relations mouvementées entre Libanais et Palestiniens, le dossier des camps des réfugiés est revenu en force ces derniers jours sur une scène politique de plus en plus fragilisée.
Prenant le relais des réfugiés du camp de Nahr el-Bared, qui ont fait face plusieurs jours durant à l’armée libanaise, les Palestiniens de Aïn el-Héloué ont poursuivi hier leur mobilisation contre la troupe, dans un mouvement dit de « solidarité » avec leurs frères du Nord. Cette contagion subite entre les deux camps – dont certains, à l’instar du ministre Ahmad Karamé et de l’ancien député Moustapha Allouche, redoutent la propagation à d’autres camps de réfugiés, voire même à d’autres régions libanaises – soulève de nombreuses interrogations quant à son timing et à l’identité des auteurs de ces incidents, ou du moins leurs commanditaires.
Si l’on en croit les déclarations officielles des responsables palestiniens, aucune faction n’a en effet intérêt à en découdre avec l’armée libanaise et à remettre en cause le modus vivendi qui prévalait jusque-là entre les deux parties, comme ils disent. À Aïn el-Héloué et à Nahr el-Bared, les représentants officiels des différentes factions palestiniennes se sont empressés d’exprimer leur attachement à la stabilité dans les camps ainsi que leur volonté d’entretenir « les meilleures relations » avec le peuple libanais et la troupe. Cela pourrait probablement expliquer, sans pour autant résoudre l’énigme, le doigt pointé vers une « cinquième colonne palestinienne », accusée par le commandant en chef de l’armée, le général Jean Kahwagi, d’être à l’origine des heurts et d’œuvrer nuit et jour à faire échec aux médiations effectuées par les parties officielles palestiniennes.
Le commandant de l’armée est en tous les cas certain qu’une tierce partie est intervenue pour saboter la relation palestino-libanaise alors qu’un accord venait d’être mis au point pour juguler les toutes premières conséquences de l’incident de Nahr el-Bared. En tout état de cause, un second accord aurait été convenu hier entre l’armée et les responsables palestiniens à Nahr el-Bared, pour calmer le jeu. Il prévoit de mettre en place un comité d’investigation chargé d’enquêter sur la mort des deux Palestiniens tués lors des heurts de ces derniers jours avec la troupe. Il stipule également le retrait des armes et la remise en liberté des 11 détenus arrêtés ces derniers jours. Il reste à savoir cependant dans quelle mesure son application sera possible à la lumière de la tension qui continuait de prévaloir en soirée.
À Aïn el-Héloué, le comité en charge de la sécurité dans les camps n’a pas voulu baisser les bras non plus. Afin de prouver sa bonne volonté, le comité s’est ainsi engagé à placer des points de contrôle militaires à chaque embranchement qui se trouve près d’un barrage de l’armée libanaise, pour éviter précisément un face-à-face entre les manifestants et la troupe. Une mesure qui semble avoir réussi partiellement, puisqu’en début de soirée, les protestataires sont revenus à la charge, alors que se déroulaient les obsèques de Khaled Youssef, brûlant des pneus et scandant des slogans hostiles à l’armée.
Le mécontentement populaire ne s’est pas limité aux camps des réfugiés. Un peu partout dans le pays, la manie des sit-in, des routes coupées et des pneus brûlés battait son plein. Après les familles des pèlerins chiites enlevés à Alep, qui ont barré, lundi, le chemin aux voyageurs pressés de prendre leur avion, c’était au tour hier des habitants du Akkar de protester contre les coupures d’électricité en bloquant les voies de passage dans plusieurs localités. En soirée, des mouvements de protestation similaires, contre le rationnement de l’électricité, ont été signalés à Choueifat, Aramoun, ainsi que dans le secteur de la galerie Semaan, à l’entrée de la banlieue sud.
Plus loin, dans la capitale du Nord, et sur un tout autre plan, les islamistes se sont rebiffés dès qu’ils ont su qu’une partie, seulement, des leurs avaient été relâchés, et non la liste escomptée qui devait, selon eux, englober notamment un responsable religieux, Tarek Merhi. Les manifestants, qui ont réinvesti la place centrale de la capitale du Nord, n’ont pas hésité à rappeler que ce sont les 180 détenus qui doivent être relâchés et non pas seulement les quatorze que la justice a accepté de relaxer après le paiement, par le Premier ministre Nagib Mikati, d’une caution. Et le représentant des islamistes, cheikh Salem Rifai, de mettre en garde contre toute « injustice » et contre le risque de discorde, laissant entendre, sans le nommer, que le général Fayez Karam, proche collaborateur de Michel Aoun et accusé d’espionnage pour le compte d’Israël, avait été relâché peu de temps après son arrestation. Une politique de deux poids, deux mesures qu’ils entendent dénoncer à leur manière, promettant de revenir à la mode du blocage des axes routiers.
De l’autre côté de la ville, sur la rue de Syrie, et en dépit des médiations effectuées au plus haut niveau entre sunnites et alaouites, l’armée se prépare à un éventuel nouveau round de violences. Pour la première fois depuis plusieurs années de tension intercommunautaire, des miradors en ciment ont été érigés par la troupe en plusieurs points de la rue qui sépare Bab el-Tebbaneh de Jabal Mohsen. Des deux côtés du front, les deux milices restent sur leurs gardes. Pour les sunnites, aucune solution n’est envisageable « tant que le gang de Rifaat Eid (le secrétaire général du Parti arabe démocrate alaouite) n’a pas évacué les lieux avec ses hommes ». Ces derniers, de leur côté, qui s’estiment encerclés par les sunnites, affirment que la cassure entre les deux camps rivaux restera vive « tant que la situation en Syrie ne se sera pas décantée ». Le retour au calme n’est pas pour demain.
No comments:
Post a Comment