The Lebanese Center for Human Rights (CLDH) is a local non-profit, non-partisan Lebanese human rights organization in Beirut that was established by the Franco-Lebanese Movement SOLIDA (Support for Lebanese Detained Arbitrarily) in 2006. SOLIDA has been active since 1996 in the struggle against arbitrary detention, enforced disappearance and the impunity of those perpetrating gross human violations.

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May 17, 2014

L'orient le jour - Quatre Sénégalaises arrêtées pour avoir passé la nuit en dehors de la maison de leur employeur, May 17, 2014



Anne-Marie El-Hage




La communauté sénégalaise du Liban est en colère. Très en colère et sous le choc. Quatre de ses ressortissantes, des employées de maison, sont embarquées mardi matin à 6 heures par les forces de l'ordre comme de vulgaires malfaiteurs. C'était lors d'une descente musclée de la Sûreté générale à Tarik Jdideh, à la Maison du Sénégal où elles dormaient paisiblement. Réveillées en sursaut, carrément jetées du lit, elles n'ont pas le droit de s'habiller loin du regard des flics ni d'aller aux toilettes. Mais elles sont houspillées, menacées, malmenées, bousculées, giflées. Une femme a toujours un œil au beurre noir, l'autre le pied foulé, la troisième ne peut oublier la gifle magistrale qui lui a été assenée.

En règle malgré tout
La police procède alors à une vérification des papiers. Les femmes se trouvent en toute légalité sur le territoire libanais. Elles travaillent sous contrat chez leur employeur. Une d'entre elles est munie de son passeport et de son titre original de séjour. La deuxième montre la photocopie de son permis de séjour. La troisième présente sa carte d'assurance et la carte de visite de son employeur. Elle assure que ses papiers sont avec ce dernier, mais on l'empêche d'utiliser son portable. Un jeune homme sénégalais qui vivait là est, lui, sans papiers. Trois de ces femmes ont l'accord de leur employeur pour passer leurs nuits dans ce lieu de rencontre des membres de la communauté sénégalaise. Mais la Sûreté générale en a décidé autrement. D'abord parquées au QG de la Sûreté générale à Sodeco, elles sont transférées au centre de rétention du secteur du Palais de justice. Aucune n'a l'autorisation de contacter ses employeurs.



Une seule femme sera remise en liberté 48 heures plus tard, celle qui avait oublié ses papiers. Et ce grâce à une patronne influente et déterminée, « outrée par le comportement des forces de l'ordre et par la passivité du consul général du Sénégal », comme elle le fait remarquer. La jeune Sénégalaise libérée est traumatisée. Les autres croupissent toujours sous terre.

Mais pourquoi cette descente musclée à la Maison du Sénégal, un appartement dont les frais de location sont financés par le consul du Sénégal, Ahmad Moukhadder, comme l'affirme ce dernier à L'Orient-Le Jour ? Pourquoi cette violence gratuite envers des travailleuses en règle qui n'ont commis aucun crime ni même le moindre délit ? Pourquoi la détention arbitraire de personnes dont les papiers sont en règle ?

À la recherche d'une employée « en fuite »
Les membres de la petite communauté sénégalaise, encore sous le choc, sont formels. Ils assurent que les autorités libanaises veulent « faire pression sur ces femmes sénégalaises et les forcer à révéler des informations sur une de leurs compatriotes ». Il s'agirait d'une « employée de maison qui aurait fui le domicile de ses employeurs pour mauvais traitements, les employeurs en question n'étant autres que des proches d'un ministre influent ». Les forces de l'ordre la recherchent donc activement. Et n'ont trouvé d'autre moyen que de procéder à l'arrestation abusive et injustifiée de jeunes femmes qui n'ont commis ni crime ni délit. « Elles les ont bombardées de questions après leur avoir montré la photo de la femme qu'elles recherchent. Elles ne seront libérées que lorsque l'employée de maison qu'elles recherchent sera retrouvée », dénoncent encore les proches des femmes détenues.





Mais la version de la Sûreté générale est différente. « Selon le système du garant en vigueur, les employées de maison étrangères doivent résider dans la maison du garant. Elles n'ont pas le droit de vivre ou de dormir ailleurs, même si elles se trouvent en situation régulière », assure une source de la SG. « C'est donc sur ordre du parquet que les forces de la Sûreté générale ont effectué une descente dans cet appartement où résident des employées de maison étrangères », poursuit-elle. « Les femmes, dont les papiers sont en règle, seront libérées une fois que leur garant viendra les récupérer », assure encore la source. Quant au jeune homme, il est en situation irrégulière depuis 2005.

De son côté, M. Moukhadder soutient que les femmes détenues seront libérées dès que les vérifications nécessaires seront terminées. Mais il ne peut s'empêcher de dénoncer « les méthodes des forces de l'ordre envers la main-d'œuvre domestique étrangère, parmi laquelle la communauté sénégalaise ».

Contacté par L'Orient-Le Jour, le représentant de Human Rights Watch, Nadim Houry, condamne une « grave situation abusive », surtout « s'il n'y a aucune accusation contre ces employées de maison et que leur employeur est d'accord pour qu'elles passent la nuit à l'extérieur ».
Assurément, la situation ne démontre que trop les dérives du système du garant qui réduit à l'esclavage les travailleuses domestiques au pays du Cèdre. Affaire à suivre...

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