The Lebanese Center for Human Rights (CLDH) is a local non-profit, non-partisan Lebanese human rights organization in Beirut that was established by the Franco-Lebanese Movement SOLIDA (Support for Lebanese Detained Arbitrarily) in 2006. SOLIDA has been active since 1996 in the struggle against arbitrary detention, enforced disappearance and the impunity of those perpetrating gross human violations.

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November 24, 2010

L'Orient le Jour - The CBC documentary: Everything converges towards Hezbollah - November 24, 2010


La télévision canadienne a mis en exergue les deux Wissam : pour glorifier le premier, Wissam Eid, présenté en génie et en héros, et accabler le second, Wissam el-Hassan, montré comme un possible suspect. Quant à la commission d'enquête, elle aussi en a pris pour son grade.

Une fois de plus, de nouvelles révélations médiatiques anticipent l'acte d'accusation sur les assassinats au Liban. Cette fois-ci, c'est la chaîne publique canadienne, la Canadian Broadcasting Corporation, qui se met de la partie, livrant ce qu'elle affirme être de nombreux détails sur l'enquête. En gros, les informations de la CBC convergent toutes vers une seule direction, le Hezbollah, lequel est implicitement accusé d'avoir liquidé aussi le capitaine Wissam Eid (nommé commandant à titre posthume). La chaîne présente ce dernier comme étant celui qui a pratiquement tout découvert. Elle impute clairement à la commission d'enquête internationale la responsabilité de sa mort, du fait de sa « négligence ».

Le documentaire canadien s'en prend en particulier aux derniers présidents de la commission d'enquête, Serge Brammertz et Daniel Bellemare.
Voici de larges extraits du texte lu dans le documentaire de la CBC :
« Ce n'est qu'à la fin de 2007 que la commission d'enquête internationale (...) est parvenue à des investigations sérieuses, c'est-à-dire près de trois ans après l'assassinat de Rafic Hariri.
« L'enquête menée par la CBC, qui a duré plusieurs mois et qui s'est fondée sur des interviews de nombreuses sources internes et sur un certain nombre de documents appartenant à la commission, a conduit à l'observation d'exemples de timidité, d'inertie bureaucratique et d'incompétence, sans compter des négligences grossières.
« Entre autres choses, CBC News a appris que :
- « Les indices rassemblés par la police libanaise et, bien plus tard, par l'ONU, montrent dans l'ensemble que les assassins relèvent du Hezbollah. Dans ce cadre, CBC News a pu disposer d'indices fondés sur les télécommunications, qui sont au cœur de l'affaire.
- « Les enquêteurs de l'ONU ont fini par se douter que leurs investigations ont dès le début été infiltrées par le Hezbollah et que la politique sécuritaire laxiste menée par la commission a probablement permis le meurtre d'un jeune officier dévoué de la police libanaise (Wissam Eid), qui avait largement percé le mystère par lui-même et qui coopérait avec l'enquête internationale.
- « Des membres de la commission ont soupçonné le chef du protocole de Rafic Hariri lui-même (Wissam el-Hassan), actuel chef des SR des FSI, d'avoir partie liée avec le Hezbollah. Mais ces soupçons, exposés dans un long mémorandum interne, n'ont pas connu de suite, essentiellement pour des raisons diplomatiques.
« Dans ses premiers mois, l'enquête de l'ONU s'était révélée prometteuse, (...) Detlev Mehlis ayant rapidement publié un rapport fracassant pointant du doigt la Syrie comme étant le commanditaire du crime, sinon l'exécutant.
« Mais le successeur de M. Mehlis, Serge Brammertz, a paru plus soucieux d'éviter toute controverse plutôt que de se lancer d'une façon ou d'une autre dans une enquête sérieuse, du moins à en croire des personnes qui ont travaillé avec lui.
« Sous sa direction, la commission a passé le plus clair de son temps à poursuivre des pistes qui se sont révélées mauvaises et à combattre d'improbables théories de complot. Cela ne signifie pas que la commission ne disposait pas de bons enquêteurs. Elle avait en son sein parmi les meilleurs de tout le monde occidental.
« Mais M. Brammertz se montrait rétif à autoriser le recours à la technologie que ces enquêteurs réclamaient, à savoir l'analyse des télécommunications, qui est probablement de nos jours l'instrument le plus important de rassemblement des informations.
« Et pourtant, de façon incroyable, la commission de l'ONU s'est abstenue de tout recours à ce procédé durant les trois premières années de son existence. Ce n'est que vers la fin du mandat de M. Brammertz que ce dernier se laissa convaincre par un détective particulièrement tenace de permettre à l'enquête de commencer à examiner les enregistrements téléphoniques.
« À ce stade, en octobre 2007, les choses commencèrent à bouger rapidement. Les membres de la commission réussirent à mettre la main sur les enregistrements de toutes les communications téléphoniques faites durant l'année de l'assassinat de Rafic Hariri - une impressionnante somme de données - et firent appel à une société britannique, FTS, pour prendre en charge les analyses spécialisées.
« Des employés de l'ONU travaillèrent jour et nuit pour placer les données dans un programme baptisé IBase. Puis, en décembre, un expert relevant de FTS commença à examiner les conclusions de l'ordinateur.
« Deux jours plus tard, il appela les enquêteurs pour leur révéler qu'il avait réussi à identifier un petit réseau d'appareils portables - huit en tout - qui pistaient Hariri dans les semaines précédant sa mort. C'était la première grande percée que la commission avait accomplie depuis sa formation, « un séisme », pour reprendre le terme utilisé par l'une des personnes présentes au moment de l'identification du réseau.
« De fait, ce que l'expert britannique avait identifié n'était rien de moins que l'escadron des tueurs, ou du moins des appareils qu'ils portaient sur eux à ce moment-là.
« Mais lorsque les enquêteurs commencèrent à faire preuve de diligence, revérifiant leurs travaux, une autre révélation les attendait, encore plus fracassante que la première. Quelqu'un retrouva un rapport envoyé un an et demi plus tôt, dans les premiers mois de 2006, par un policier libanais de rang moyen. Or ce policier avait non seulement identifié ce que la commission baptisera par la suite le "réseau rouge", c'est-à-dire le groupe des tueurs, il avait découvert bien davantage, les réseaux se cachant derrière les réseaux. En fait, il avait mis au jour un complot complexe et rigoureux qui devait avoir été planifié durant au moins un an et il avait déjà interrogé des suspects. De plus, tout ce qu'il avait découvert allait dans une seule direction : le Hezbollah.
« Le tout était consigné dans le rapport du policier et dûment adressé aux responsables de l'ONU avec lesquels il était censé être en partenariat. Et la commission perdit aussitôt ce document !
« Wissam Eid avait rang de capitaine des FSI au moment de l'assassinat de Hariri. Son patron, le lieutenant-colonel Samir Chehadé, le chargea de l'enquête. Très tôt, il découvrit les téléphones "rouges" utilisés par les tueurs. Il s'agissait d'un group discipliné. Ils communiquaient entre eux et presque jamais avec d'autres appareils. Et aussitôt après le meurtre, le « réseau rouge » disparut à jamais. Mais Eid découvrit une autre connexion.
« Il découvrit que chacun des membres du groupe des tueurs portait un second appareil pour communiquer avec un réseau bien plus large, mis en place au moins un an plus tôt. L'ONU baptisera ce groupe le "réseau bleu".
« Ce réseau bleu était aussi très discipliné et complètement fermé à l'extérieur. Mais ses membres possédaient d'autres appareils, ce qui permit à Eid d'aller encore de l'avant dans ses investigations. La percée intervint lorsque le réseau bleu fut liquidé et que les appareils eurent été remis à un petit électronicien qui travaillait pour le Hezbollah, Abdel Majid Ghamlouch.
« Un ex-enquêteur de l'ONU qualifiera Ghamlouch d'"idiot". Chargé de rassembler et de se débarrasser des téléphones bleus, ce dernier constata qu'il y avait encore des unités disponibles sur certains d'entre eux. Il se servit alors d'un appareil pour appeler son amie, se laissant ainsi grossièrement identifier par le capitaine Eid. Il aurait pu tout aussi bien écrire son nom sur un panneau et le poser face au QG des FSI.
« La gaffe de Ghamlouch mena ultérieurement Eid à deux autres personnes, les frères Hussein et Mouïn Khreiss, relevant du Hezbollah. L'un d'eux se trouvait sur les lieux de l'attentat.
« Allant de l'avant, le capitaine identifia d'autres appareils directement ou indirectement associés au groupe des tueurs. Il mit ainsi au jour le noyau d'un troisième réseau, un groupe de surveillance à long terme qui sera par la suite baptisé les "jaunes".
« Les travaux de Eid mèneront aussi à une autre découverte : tout était lié à des lignes fixes se trouvant à l'intérieur de l'hôpital "al-Rassoul al-Aazam" dans la banlieue sud de Beyrouth. Il a longtemps été dit que le Hezbollah entretient un centre de commandement dans cet établissement.
« Plus tard, un autre réseau de téléphones, "les roses", fut identifié. Ces appareils communiquaient à la fois avec l'hôpital et, indirectement, avec les autres réseaux.
« Enfin, Eid reçut un indice de la meilleure source possible : il fut contacté par le Hezbollah lui-même. On lui dit que les appareils qu'il était en train de dépister étaient utilisés par des agents menant une opération de contre-espionnage à l'encontre du Mossad et on lui signifia qu'il fallait abandonner l'affaire.
« L'avertissement ne pouvait être plus clair. Et, comme pour le souligner, le lieutenant-colonel Chehadé fut victime d'un attentat en septembre 2006. L'explosion tua quatre de ses gardes et lui-même fut grièvement blessé et emmené à Québec pour y être soigné.
« À ce moment-là, le capitaine Eid avait déjà envoyé son rapport à l'ONU. Ce document fut ajouté à la base de données de la commission par une personne qui, apparemment, ne comprit pas sa teneur, ou bien ne lui accorda pas trop d'importance. Il disparut.
« Un an et demi plus tard, quand le rapport Eid refit surface, la première réaction du groupe des télécoms de l'ONU fut l'embarras. Puis le soupçon.
« Eid avait affirmé avoir réalisé ses analyses en utilisant uniquement des feuilles de calcul Excel. Or, selon l'expert britannique, cela est impossible. Personne, déclara-t-il, ne peut accomplir une telle tâche sans une puissante assistance informatique et l'entraînement requis. Or aucun amateur - c'est ainsi que les spécialistes qualifiaient Eid - n'est en mesure de naviguer au travers des millions de permutations possibles posées par les enregistrements téléphoniques.
« Ce capitaine Eid a dû recevoir de l'aide, pensèrent les experts. Quelqu'un lui a fourni ces informations. Peut-être est-il lui-même impliqué ?
« Nous étions en janvier 2008. La commission avait un nouveau président, le canadien Daniel Bellemare. Les enquêteurs commençaient enfin à croire qu'ils bougeaient. Une délégation d'experts en télécoms fut dépêchée pour rencontrer Eid. Après l'avoir interrogé, ils retournèrent convaincus que, d'une manière ou d'une autre, il avait identifié les réseaux tout seul.
« Eid apparut alors comme un génie mathématique, un de ces champions d'échecs capables d'anticiper plusieurs coups à l'avance. Et de plus, il était disposé à aider. Il voulait que les assassins de Hariri soient traduits en justice. Qu'importe l'avertissement du Hezbollah !
« Une semaine plus tard, une délégation plus large de l'ONU rencontra le capitaine Eid. À nouveau, tout alla bien. Le lendemain, 25 janvier 2008, le capitaine Wissam Eid connut le même sort que Rafic Hariri. Le Liban retransmit les funérailles de Eid à la télévision. À la commission de l'ONU, il y avait aussi de la colère, mais mélangée à un sentiment de honte. Car dans l'esprit de chaque membre de l'équipe des télécoms, aucun doute n'était plus permis sur les causes de la mort de Eid : ils déduisirent que le Hezbollah avait su que le rapport du capitaine avait été redécouvert, qu'il avait rencontré des enquêteurs de l'ONU et qu'il était disposé à travailler avec eux.
« Le colonel Wissam el-Hassan fut dès le début au centre de l'intérêt de la commission. Pour deux raisons : il constitua très rapidement l'un des principaux liens avec les FSI et c'était lui qui avait la charge de la sécurité de Hariri au moment de l'assassinat. Sauf qu'il ne se trouvait pas dans le convoi le jour de l'explosion et que son alibi (un passage d'examens à l'UL) fut jugé pour le moins fragile. D'autant que les enregistrements de ses communications fournirent une version totalement différente de la sienne. On découvrit qu'au moment où il était supposé préparer ses examens, il fit 24 appels téléphoniques, soit un appel chaque neuf minutes. Et puis, les enquêteurs s'interrogeaient : est-il commun qu'un haut responsable de la sécurité au Liban passe des examens ?
« On voulut interroger le professeur d'université. Mais M. Brammertz s'y opposa. Il considérait le colonel Hassan comme un contact trop important. Un mémorandum confidentiel recommanda qu'une enquête discrète soit menée auprès de lui. Mais même cela ne fut pas fait.
« Cependant, le colonel était devenu le patron de Eid. Il était certainement au courant du soudain regain d'intérêt pour le rapport du capitaine et des rencontres avec les enquêteurs. " Je ne pense pas qu'il ait participé au meurtre, mais il n'y a aucun moyen de dire ce qu'il savait ", affirme un ancien responsable de l'ONU.
« De leur côté, des responsables de la précédente administration américaine, dont certains étaient présents dans le bureau Ovale de la Maison-Blanche le jour où le président George W. Bush fulminait contre l'apparente incompétence de la commission d'enquête, avancent l'argument selon lequel le colonel Hassan est un ennemi juré du Hezbollah. Le soupçonner serait faire le jeu de ce dernier.
« Toutefois, de nombreux anciens enquêteurs restent suspicieux. Ils pensent que le Hezbollah a infiltré la commission et qu'il a eu recours, pour ce faire, au colonel Hassan. "Il nous a menti sur l'alibi. Il aurait dû normalement mourir dans le convoi. C'est le point-clé", disent-ils.
« Tout comme Brammertz, Bellemare est particulièrement discret au sujet des éventuels progrès enregistrés. Il a rejeté toutes les demandes que CBC news lui avaient adressées à plusieurs reprises pour l'interroger sur les questions soulevées dans ce reportage.
« L'équipe de télécoms relevant de la commission avait vraisemblablement établi une série de diagrammes sophistiqués du réseau téléphonique lié à l'assassinat de Hariri.
« Au cours des derniers mois, les enquêteurs avaient même collé des noms à certaines « lignes rouges » employées par les assassins de Hariri. Mais selon plusieurs sources, le problème principal avait été de convertir les analyses des télécommunications en éléments de preuves susceptibles d'être pris en compte par le tribunal. En d'autres termes, il fallait trouver des reçus, des témoins ou d'autres preuves pour démontrer l'appartenance de ces lignes aux assassins.
« Selon ces sources, c'est à partir de la mi-2009 que la commission s'était attelée à cette tâche. "Il n'y avait pas la moindre preuve confirmée, révèle un ancien membre (de la commission). Il n'y avait non plus pas la moindre chance d'en obtenir. Et pour cause : qui peut être lancé sur le terrain dans la banlieue sud de Beyrouth avec pour mission de mener une enquête ? Personne. Cela n'est pas possible."
« Plus encore, la commission n'avait jamais procédé aux écoutes téléphoniques, même après avoir identifié certaines lignes du réseau qui n'avaient pas été annulées. De toute évidence, toute requête qui aurait été adressée aux autorités libanaises pour surveiller certaines communications téléphoniques serait parvenue au Hezbollah, étant donné les contacts de ce dernier. Bellemare ne permettait pas non plus à ses enquêteurs d'acheter et d'utiliser leurs propres matériels d'écoute.
« Il n'en demeure pas moins qu'il s'était rendu à Washington dans l'espoir d'obtenir l'aide des services de renseignements (...) mais il était rentré bredouille. Les Américains n'étaient pas favorables à sa nomination et ne lui portaient pas une grande estime. Ils étaient conscients qu'il passait la majeure partie de son temps à s'occuper de la décoration de son bureau, à ordonner des costumes sur mesure, à vanter ses propres compétences de procureur et à dessiner des armoiries personnelles.
« Sidérés, ses collaborateurs le voyaient envoyer des agents de sécurité dans les centres commerciaux les plus huppés de Beyrouth pour estampiller les armoiries familiales sur des bijoux. " Si je me laissais aller à lancer des théories sur des complots, je pourrais dire qu'il avait été délibérément nommé pour ne rien faire ", affirme un de ses anciens collaborateurs.
« Des éléments de preuve secrets interceptés par des services de renseignements occidentaux comme la CIA ou l'Agence nationale de sécurité ne peuvent pas être présentés à une cour comme le TSL. Étant donné les fuites et autres problèmes auxquels la commission était confrontée, aucun service de renseignement occidental n'était disposé à lui remettre des éléments aussi importants.
« Lorsque (Stephen) Hadley (le conseiller de George Bush pour les Affaires de sécurité) s'était enquis auprès de Bellemare au sujet de ce que ce dernier considérait comme un succès, à savoir la publication d'un acte d'accusation, des arrestations, des soupçons officiels... le Canadien avait répondu par une sorte de verbiage, incapable ou peu désireux de donner de réponses précises.
« Entre-temps au Liban, le Hezbollah commençait à mener campagne contre le TSL. (...) Plusieurs anciens enquêteurs de l'ONU estiment que même si les éléments de preuves téléphoniques étaient présentés au public libanais, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, reconnaîtrait que ses hommes étaient effectivement sur le terrain lorsque Hariri avait été assassiné, mais dirait qu'ils étaient à la poursuite des assassins israéliens. Rien dans les trouvailles de l'ONU n'accable cependant Israël. Tout accable le Hezbollah.
« Un ancien responsable au sein de la commission indique que des " progrès substantiels " ont été réalisés au début du mandat de Bellemare au niveau de l'obtention de preuves relatives au réseau de télécoms. Mais il reconnaît que ces preuves restent largement circonstancielles.
« Vers la fin de 2007, Wissam Eid vivait pratiquement dans son bureau parce qu'il était persuadé qu'il n'allait plus vivre longtemps, selon son frère Mohammad. La famille sait presque avec certitude qui l'a assassiné, mais sa mère affirme ne rien pouvoir dire pour protéger ses autres fils. » 

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