C'est une belle leçon de courage que donne Manal Samir, une Jordanienne longtemps victime d'abus sexuels, à toute personne qui se trouve dans la même situation. Restée silencieuse pendant de longues années, se résignant à son triste sort, elle a enfin décidé de réagir. Prenant son courage à deux mains, elle se refait une nouvelle vie. À travers une exposition d'arts plastiques, elle raconte ainsi son histoire et dénonce, par la même occasion, la violence et l'injustice faites aux enfants.
Manal Samir, détentrice d'un magistère en beaux-arts, a en fait trouvé dans l'art un moyen pour se faire une autothérapie. L'exposition, inaugurée mardi et qui se poursuit jusqu'à aujourd'hui au Centre international des sciences de l'homme de l'Unesco (CISH) à Jbeil, constitue un nouveau point de départ pour la jeune femme, qui ne cache pas sa confiance en Dieu, qui l'a aidée à « résoudre ses problèmes », bien que pendant « une très longue période, je l'ai rejeté parce que je considérais qu'il était la cause de mes malheurs et de mes souffrances ».
« Cette mariée représente ce que j'ai été un jour », dit Manal Samir, pointant du doigt un mannequin décapité revêtu de la robe blanche de la mariée. La femme à l'allure frêle confie : « Il y a une rupture entre la peur du passé qui a été trop difficile et douloureux et le présent qui est supposé être un beau rêve qui se concrétise. Je suis affectée par le sort de l'enfant qu'a été Manal et non par mon sort à l'heure actuelle. Aujourd'hui, Manal se rétablit... »
Du verre brisé à l'image de « la vie de la petite enfant qui s'est effondrée en un instant », un mannequin sans traits revêtu d'une légère combinaison transparente pour représenter cet enfant à qui on a ôté l'innocence « avant même qu'elle n'atteigne la puberté », un miroir cassé, parce que « quand je me regardais dans la glace, je ne voyais qu'une Manal brisée », un baby-foot, mais au lieu de jouer avec la balle, les adultes jouent avec « le sort des enfants et leur volent leur enfance »... autant d'objets qui mettent l'accent sur cette tragédie que Manal Samir a vécu trente ans durant. Trois décennies durant lesquelles « je me suis haïe, je me suis fait mal »... avant de se ressaisir et de décider de changer son destin.
La jeune femme confie en outre qu'elle « a eu tort en taisant ce qu'elle endurait ». S'adressant aux enfants victimes d'abus sexuels, elle insiste sur la nécessité « de tout raconter aux parents, qui doivent, à leur tour, être attentifs à tout changement aussi minime soit-il qui affecte le comportement des enfants, d'autant qu'il peut constituer un signe d'un abus dont il pourrait être victime ».
L'exposition est organisée par le comité libanais de lutte contre la violence faite aux femmes (Lecorvaw), avec le soutien de l'association suédoise Kvinna Till Kvinna et de l'ONG libanaise Abaad. Elle est placée sous l'égide du ministre des Affaires sociales, Rachid Derbas.
No comments:
Post a Comment