Le président de la commission des Relations étrangères au Sénat américain, John Kerry, a effectué hier une visite-éclair au Liban, où il a été reçu par le président Michel Sleiman et le Premier ministre, Saad Hariri, en présence de l'ambassadrice US, Maura Connelly, avant de se rendre à Damas, pour un entretien avec le président Bachar el-Assad.
Dans une déclaration à la presse à sa sortie du Sérail, M. Kerry a souligné que son pays attend de la Syrie de jouer un rôle constructif au Liban et a réaffirmé l'attachement de Washington à l'indépendance du Tribunal spécial pour le Liban, précisant que Beyrouth n'a pas le pouvoir de le changer. De manière générale, il a indiqué qu'il a examiné avec son hôte la situation locale, ainsi que des questions liées à la Syrie, à l'Iran et au processus de paix au Moyen-Orient. « Nous sommes, le président Obama et les États-Unis, très reconnaissants pour le leadership dynamique et constant du Premier ministre Hariri dans ces circonstances difficiles. Nous comprenons tous la façon dont le gouvernement partage le pouvoir et la responsabilité, ainsi que la difficuté de trouver un consensus. Mais nous croyons que le Premier ministre a montré, non seulement pour le Liban, mais également pour la paix et la stabilité dans la région, un leadership et une vision qui sont très importants pour nous tous », a-t-il dit, avant de réaffirmer « le soutien indéfectible de son pays à un Liban souverain, indépendant et stable ». « C'est important pour nous », a-t-il observé, en soulignant l'engagement du président US en faveur du renforcement des institutions démocratiques locales et en précisant que l'aide économique et sécuritaire américaine « se poursuivra pour contribuer à l'édification d'institutions fortes ».
« En finir avec les assassinats »
M. Kerry a ensuite mis l'accent sur l'appui « ferme des États-Unis au travail et à l'indépendance du Tribunal spécial pour le Liban », avant de déclarer : « Permettez-moi de rappeler que le TSL n'a pas été créé par les États-Unis ou par une entité individuelle dans cette région. Il a été demandé par le Liban, par des Libanais qui sont fatigués de la notion de l'assassinat comme outil politique (...) L'ère des assassinats doit se terminer, et les Nations unies ont décidé que le moment était venu pour le Liban de trouver un nouvel avenir. C'est de cela qu'il s'agit, et cela n'a rien à voir avec des chiites contre des sunnites, des chrétiens ou des druzes. Il n'y a pas de sectarisme et il n'existe aucune association avec une entité particulière. Les Nations unies sont à la recherche de la vérité et nous appuyons totalement l'indépendance de ce tribunal et la capacité du Liban à aller au-delà de ce genre d'outil violent et destructeur qui a été employé. »
M. Kerry a ensuite insisté sur le fait que le chef du gouvernement et le Liban de manière générale « n'ont pas le pouvoir de changer quoi que ce soit au tribunal créé par les Nations unies », avant d'ajouter que personne ne connaît les résultats de l'enquête sur l'assassinat de Rafic Hariri. « Je pense, a-t-il dit, que quels qu'ils soient, ces résultats ne sont pas dirigés contre un groupe de personnes et ils ne reflètent pas un point de vue sectaire ou religieux. (...) Le président Obama croit que le tribunal est important parce qu'il s'adresse à tout le peuple libanais et non à un groupe ou un autre, et parce qu'il permet une vie politique dans ce pays sans la peur et l'assassinat. »
Le sénateur américain a ensuite évoqué sa visite à Damas, affirmant qu'il aura des conversations supplémentaires avec le président Bachar el-Assad au sujet des défis au Moyen-Orient. Se disant favorable à un engagement américain plus soutenu à l'égard de Damas, M. Kerry a jugé nécessaire de « travailler ensemble pour trouver le chemin de la paix entre la Syrie et Israël ». « Je crois que ce chemin existe, et nous allons continuer à travailler pour améliorer et normaliser les relations bilatérales entre le Liban et la Syrie », a-t-il poursuivi, précisant qu'il aura avec le président Assad des discussions sur des questions qu'il a aussi soulevées avec M. Hariri.
« Rien de ce que nous discutons et rien de ce sur quoi nous nous mettons d'accord avec la Syrie ne se fera jamais au détriment du Liban ou du peuple libanais », a-t-il ajouté, avant de se dire « encouragé par les mesures que le Liban a prises ces dernières années en dépit de la tension qui continue de prévaloir ». Il a demandé aux « parties qui sont en mesure de faire une différence dans les décisions qui doivent être prises dans les jours à venir de penser au potentiel du Liban, de réfléchir sur les opportunités et les possibilités économiques, de tourisme, l'impact sur l'économie du pays ainsi que sur tout ce qui peut être fortement affecté par les choix qui seront faits ».
« Une force constructive »
En réponse à une question, il a indiqué que l'accréditation d'un ambassadeur américain à Damas dépendra, « dans une certaine mesure, du comportement de la Syrie ». « Nous attendons de la Syrie qu'elle joue un rôle constructif dans les prochains jours dans ce qui se passe ici, au Liban, et je vais parler de cela avec le président Assad. Nous voulons que la Syrie soit une force constructive pour la paix avec le Liban, avec Israël, dans la région, pour nous aider en ce qui concerne les défis de l'Iran. Damas pourrait tirer de nombreux avantages de ce genre d'action au niveau de ses relations avec les États-Unis et l'Occident. »
Les propos de John Kerry, estiment les observateurs, revêtent une importance particulière à partir du moment où ils interviennent après ceux du secrétaire d'État adjoint pour le Proche-Orient, Jeffrey Feltman, qui avait accusé la Syrie de contribuer à la déstabilisation du Liban.
Au terme de son entretien avec le chef d'État syrien, en fin d'après-midi, M. Kerry a souligné « l'importance » de continuer à dialoguer avec Damas « pour consolider la sécurité et la stabilité, et pour réaliser la paix » au Proche-Orient. Ses propos ont été rapportés par l'agence syrienne SANA, selon laquelle M. Assad a aussi affirmé devant son hôte que Damas « œuvrait en faveur d'une paix juste au Proche-Orient. Le président syrien a aussi rendu hommage à la volonté de son homologue américain de réaliser la paix dans la région et affirmé que le véritable problème résidait dans la partie israélienne qui rejette la paix ».
Parallèlement, l'ambassadrice des États-Unis s'est rendue en soirée auprès du président des Kataëb, Amine Gemayel, ainsi qu'auprès du chef des Forces libanaises, Samir Geagea, pour un tour d'horizon de la situation locale et régionale, et pour les informer des résultats de la visite de M. Kerry.
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