The Lebanese Center for Human Rights (CLDH) is a local non-profit, non-partisan Lebanese human rights organization in Beirut that was established by the Franco-Lebanese Movement SOLIDA (Support for Lebanese Detained Arbitrarily) in 2006. SOLIDA has been active since 1996 in the struggle against arbitrary detention, enforced disappearance and the impunity of those perpetrating gross human violations.

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April 5, 2012

L'orient le jour - Merhi Kanaan : À la maison, nous attendons toujours mon frère, April 5 2012


Le sort de milliers de Libanais – et de ressortissants arabes – disparus durant la guerre civile et la période qui l’a suivie sous la tutelle syrienne au Liban reste inconnu. Pour que ce dossier vieux de plus de trente ans ne reste pas occulté et relégué aux oubliettes, « L’Orient-Le Jour » relatera chaque semaine le témoignage d’un parent en quête de la vérité sur le sort d’un disparu.
Le 16 juin 1986, le sergent-chef Chamel Kanaan, originaire de Chebaa et basé à Tyr, s’est rendu à Beyrouth mais a disparu en chemin. « Il avait 27 ans, se souvient son frère Merhi Kanaan, d’un an son cadet. Nous étions à Chebaa. La région était occupée par les forces israéliennes et les communications étaient presque inexistantes. C’est à travers le contingent norvégien de la Finul que nous avons su que mon frère n’était pas revenu à son poste de travail. Nous avons immédiatement commencé à le chercher. »

« Mes parents ont commencé par contacter les différents partis libanais, poursuit Merhi Kanaan. Ils leur ont affirmé qu’il n’était pas chez eux. C’est alors que nous avons soupçonné qu’il serait en Syrie, d’autant qu’il avait des problèmes avec sa belle-mère qui avait un parent haut placé au sein du Baas syrien. »

En fait, Chamel Kanaan, quatrième enfant d’une famille formée de cinq garçons et deux filles, s’était fiancé trois mois après le décès de son épouse des suites d’un cancer. Sa belle-mère, n’ayant pas apprécié sa décision, « l’avait menacé à plusieurs reprises », raconte Merhi Kanaan. « Nous l’avons affrontée, mais elle a démenti être impliquée dans la disparition de Chamel, poursuit-il. Les services de renseignements au Liban-Sud l’ont même interrogée. Elle s’est évanouie au cours de l’interrogatoire, puis a succombé à une crise cardiaque quelque temps plus tard. »

La famille Kanaan s’est décidée donc à suivre la piste syrienne. « Nous avons été voir des responsables du Baas qui nous avaient affirmé détenir mon frère, note Merhi Kanaan. Ils nous avaient promis de le libérer une heure plus tard. C’était il y a vingt-six ans ! Nous avons su qu’il a été gardé pendant de nombreuses années dans un hangar à Ras el-Nabeh et qu’il a été transféré par la suite à Majdel Anjar. Nous avons même été victimes de nombreux escrocs qui nous avaient promis de ramener mon frère. Nous avons payé des fortunes et nous n’avons jamais pu le voir. »

En 1993, la famille de Chamel Kanaan a reçu un petit bout de papier sur lequel ce dernier avait inscrit son nom. « J’ai pu m’assurer de son écriture, affirme Merhi Kanaan. En 1995, mon père a été en Syrie, quelques mois avant qu’il ne décède. Lorsqu’il est arrivé à la prison de Palmyre, les soldats l’ont renvoyé en lui disant que son fils n’y était pas. Trois mois plus tard, ma mère et ma belle-sœur se sont rendues à leur tour à Damas. On avait reçu des informations selon lesquelles Chamel serait emprisonné à la section Palestine (prison des services de renseignements syriens, NDLR). Elles ont attendu une demi-heure avant qu’un soldat ne vienne annoncer que “le courant s’est coupé et qu’il ne pouvait plus chercher”. Elles n’ont pas pu le rencontrer, mais ma belle-sœur a pu apercevoir son nom dans le dossier placé devant le responsable de la prison. »

La dernière information que la famille Kanaan a reçue concernant Chamel remonte à huit mois. « Un ancien détenu en Syrie, d’origine palestinienne, m’a appelé, note Merhi Kanaan. Il m’a raconté qu’en 2007, il était avec mon frère à la prison al-Fayha’. Selon lui, c’est une prison tenue secrète où l’on enferme les politiciens. »

Chamel Kanaan était le père d’une enfant née avec une malformation congénitale et décédée il y a trois ans. « Depuis sa disparition, l’ambiance à la maison est maussade, affirme son frère. Mes parents n’ont plus connu la joie. Ils n’ont jamais plus été à un mariage. Même nous, nous nous sommes mariés discrètement. Nous ne pouvons pas oublier. Nous attendons. Même s’il est mort, qu’ils nous donnent ses restes. Nous ne baisserons pas les bras. La vérité finira par éclater au grand jour. »

http://www.lorientlejour.com/category/Liban/article/753135/Merhi_Kanaan+%3A_A_la_maison%2C_nous_attendons_toujours_mon_frere.html

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